Courtillot, de la science à la politique

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Ce que font les scientifiques de leur vie privée les regarde. Mais avouer que quand on est physicien, aller s’afficher avec de drôles de zozos dans une fondation politique qui se garde bien de dire qui la finance, il y a de quoi surprendre.

C’est en lisant, sur la suggestion d’un honorable correspondant, un texte du physicien Vincent Courtillot, qui consacre ses travaux à tenter de démolir l’idée d’un réchauffement climatique lié aux activités humaines, que j’ai découvert son appartenance à la Global Warming Policy Foundation, une organisation fondée en Grande-Bretagne l’an dernier par Nigel Lawson, qui a dirigé les finances britanniques pendant six ans, sous le règne de Margaret Thatcher. Dans ce texte, Courtillot raconte —dans des termes mesurés— sa vision de l’absurde réunion organisée à huis-clos par l’Académie des sciences, déjà évoquée dans ces colonnes. Reste que le chercheur français, qui martèle, sans convaincre les climatologues, que le soleil est le grand méchant réchauffement de climat de ces dernières décennies, a estimé —tout en disant que son affirmation comporte «Une grande part d’incertitude»— que la moitié de l’assistance penchait pour sa thèse d’un réchauffement solaire, et l’autre pour la thèse d’une augmentation de l’effet de serre.

Vérification faite, le physicien français a rejoint le conseil académique de la GWPF en juillet dernier. On y retrouve quelques-unes des grandes figures climato-sceptiques, comme le climatologue américain Richard Lindzen, le français Christian Gérondeau, le canadien Ross McKitrick ou l’écrivain Matthew Ridley, auteur de bests-sellers scientifiques. Bizarrement personne, pas plus le physicien Courtillot, ne semble avoir tiqué en voyant dans la bannière du site de la fondation, le graphique intitulé «Température moyenne globale du 21e siècle», qui montre l’évolution de la température de 2001 à 2009. C’est pourtant une belle manière de présenter la climatologie, pour une organisation qui se veut discuter du climat en toute objectivité…

Comme il est de coutume, la GWPF ne dit pas qui la finance. On ne sait donc pas grand chose de ses moyens, ni des motivations de ses donateurs, si ce n’est qu’ils partagent les idées climato-sceptiques de ses fondateurs, et qu’ils condamnent par avance les politiques de lutte contre le réchauffement climatique. Enfin, on peut le supposer! La seule indication, qui a été donnée en novembre dernier dans le discours inaugural de Nigel Lawson, c’est que la fondation n’accepte pas, je cite «les dons de sociétés du secteur de l’énergie ou de quiconque a des intérêts significatifs dans une compagnie énergétique». Soit. mais elle ne semble pas vérifier le pedigree de ses membres (1). Et elle accepte, dixit Lawson, les dons émanants d’autres sociétés charitables, qui sont bien souvent un moyen de blanchir des capitaux émanant d’industriels. On l’a déjà vu dans le passé avec les moyens considérables qu’une firme comme Exxon versait à tout un réseau d’organisations non gouvernementales qui servaient ses intérêts.

Evidemment, certains ne manqueront pas de critiquer mon parti-pris, dès qu’il s’agit d’organisations climato-sceptiques. Ils se trompent. La moindre des choses, quand on défend des intérêts politiques, c’est de dire d’où vient l’argent qu’on dépense (1). Et les membres de la GWPF, si prompts à critiquer le manque de transparence des climatologues ferait bien de balayer devant leur porte. La fondation critiquait tout récemment la comptabilité opaque de la branche britannique du TERI, l’organisation dirigée par Rajendra Pachauri (le patron du groupe d’experts de l’ONU sur le climat, ou GIEC). Chiche, on publie les comptes de tout ce petit monde, et on saura à qui on a affaire. Parce que l’origine des fonds des laboratoires de recherches publics en climatologie, on la connaît, c’est vous et moi. Allez monsieur Claude, vous nous promettez de tout nous dire sur ceux qui financeront votre «Ecologie d’Avenir»?

[MAJ du 5/10/10@20:52] Un papier du Guardian soulignait l’an dernier que la GWPF loue ses locaux à l’Institut des matériaux, minéraux et des mines. Ça ne s’invente pas…

(1) D’ailleurs, vous pouvez juger sur pièces. Et même s’il n’est pas question de verser des milliers de livres sterling par Paypal, le site internet permet de verser son obole sans signer le moindre document stipulant qu’on n’a pas d’intérêt dans une compagnie pétrolière ou autre. Et le bulletin d’inscription de membre ne fait pas autrement.

7 commentaires

  1. En gros ne pas accepter de « dons de sociétés du secteur de l’énergie ou de quiconque a des intérêts significatifs dans une compagnie énergétique », ça veut juste dire « nous sommes financés par Koch industries et pas par Exxon ».

    Je vote pour les frères Koch, un ancien ministre de Thatcher : tous les malades mentaux qui s’imaginent qu’Atlas Shrugged décrit des faits réels au lieu d’être une fiction mal rédigée ne peuvent que se baisser et ouvrir leur porte-feuille en grand…

  2. Un ‘climato-sceptique’, cela n’existe pas. Des gens payés pour dire n’importe quoi, oui, ou des gens prêts à gober n’importe quoi, cela existe aussi. On en trouve même qui renient la réalité, mais aucun de ces catégories ne mérite le terme ‘sceptique’, car aucun n’a exprimé sa réflexion profonde qui permettrait d’infirmer ou de douter d’un siècle de travaux.

  3. Toxymoron,

    Des gens prêts à gober n’importe quoi vous en trouverez aussi chez les réchauffistes des malhonnêtes aussi. La malhonnêteté de Courtillot est connue depuis un moment déja.

      1. Les gens qui soutiennent la version de la responsabilité anthropique dans l’accélération du réchauffement.


  4. Merci pour cet article qui demontre les paradoxes de ces pseudo-scientifiques. Comment peut-on se permettre d’avoir une legitimite ainsi, sous couvert d’une sombre fondation dont on ne sait rien sur les membres, activites, financements… Qui peut bien les ecouter ?
    Il est effrayant de voir que ces scientifiques, qui occupent parfois des postes importants, sont pres a rejoindre le cote obscur de la science… Honte a eux!

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