La faim ne recule plus. Pire, elle gagne du terrain.

Pendant que les promos de Noël sur la bouffe battent leur plein, le dernier rapport de la FAO (1) publié mardi fait froid dans le dos. Après une relative stabilité depuis le début des année quatre-vingt dix, le nombre de crève-la-faim a poursuivi cette année la hausse constatée depuis 2005. Ce sont sans doute près de 963 millions de personnes qui ont l’estomac dans les talons en cette fin d’année. Quarante millions de plus en un an, et 115 millions de plus qu’en 2004… En douze ans, entre 1992 et 2004, seules six millions de personnes s’étaient ajoutées à la cohorte des malnutris.

En cause cette année, la hausse des prix alimentaires. Malgré une baisse assez nette depuis le mois de juillet (2), les prix des céréales reste inabordable pour les plus pauvres. La FAO note aussi que si la production a cru fortement cette année dans les pays développés (11%), les agriculteurs voulant profiter des cours favorables, la hausse n’est que de 0,9% dans les pays en développement. Et leur production a même baissé de 1,6%, si on enlève les trois géants du Sud (Chine, Brésil, Inde).

Le pire, c’est qu’en dépit de la baisse des cours alimentaires, la malnutrition devrait encore progresser l’an prochain, selon la FAO. La croissance de 6% attendue dans les grands pays émergents devrait modifier les habitudes alimentaires, et favoriser le recours à la viande, facteur de pression sur les quantités de céréales disponibles. S’ajoutent aussi la pression démographique, la crise économique qui prive de travail des centaines de milliers d’ouvriers des pays pauvres et aussi la forte hausse de la demande en biocarburants. Dans certains pays, la situation politique ou conflictuelle pèse aussi sur la production agricole. En 2004, plus de 75% des habitants de République Démocratique du Congo étaient mal nourris, contre 30% en 2004 1992.

La disette frappe aussi sévèrement la Somalie, le Zimbabwe, le Lesotho et le Swaziland. La situation n’est pas très brillante en Afghanistan, en Mauritanie, En Erythrée, au Sierra Leone et au Libéria, en Birmanie. Elle est même catastrophique en Corée du Nord. En Chine, Sri Lanka, Philippines, Soudan, Tchad, Ethiopie et Kenya, l’insécurité alimentaire reste criante dans certains zones. C’est aussi le cas dans certaines régions de Bolivie.

Selon la FAO, les causes profondes de la faim ont fortement évolué. L’agence des nations-unies estime que dans les années quatre-vingt, les guerres provoquaient 98% des famines qui ne sont pas provoquées par des catastrophes naturelles. Aujourd’hui, ce chiffre est retombé à 73%. Le reste vient de la dégradation des conditions socio-économiques…

(1) Organisation des Nations-Unies pour l’alimentation et l’agriculture. Le rapport et un petit résumé sont disponibles sur le site de la FAO.

(2) En novembre 2008, le prix du riz est revenu un peu au dessus de ce qu’il était à la même époque en 2007. Mais il reste à un niveau entre deux et trois fois supérieur à ce qu’il était en 2004, suivant le type de riz. (source FAO, décembre 2008)

5 commentaires

  1. En 2004, plus de 75% des habitants de République Démocratique du Congo étaient mal nourris, contre 30% en 2004

    Pouvez-vous corriger les dates ? Merci

  2. Author

    Merci de votre vigilance! Ils s’agissait des chiffres de 1992 et 2004. L’article est corrigé.

  3. @DDq, l’accroissement de la population mondiale a été d’environ 80 millions cette année. L’augmentation du nombre d’affamés est donc de la moitié de cette valeur! Mais c’est promis juré, les progrès de l’agriculture vont faire disparaître incessamment sous peu le problème.

  4. D’ailleurs, d’après un article récent de Le Monde, l’OMC aurait commandé un rapport sur l’agriculture qui préconise qu’on revienne sur la notion de marché global pour l’agriculture et qu’on réoriente les pays pauvres vers des cultures vivrières. Une bonne chose si ce rapport est suivi d’effets.


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