Un peu de poésie dans ce monde de brutes! Une fois n’est pas coutume (1), j’avais envie de vous parler du chant du moustique. Bon, d’accord, il n’y a pas que de la poésie puisqu’il s’agit d’Aedes aegypti, le redoutable vecteur de la dengue. Mais oublions un instant que c’est un tueur.
Comme chez les oiseaux, la parade d’amour d’A. aegypti est une affaire de chant. Ou plus exactement affaire de vibration (2). Chez la femelle, le battement des ailes se passe autour de 400 Hertz (400 battements par seconde). Chez le mâle, c’est du 600 Hz. Alors, comment fait-on, chez le moustique pour accorder sa fréquence? Et bien on trouve une harmonique, dans ce cas le fameux plus petit commun multiple, vous savez le PPCM qui a hanté votre enfance… Et donc ces vilaines bestioles paradent à 1200 Hz… Donc elles ne sont pas sourdes.
La nature est une flemmarde, et c’est donc la première harmonique, histoire d’économiser de l’énergie, qui prépare l’amour. 1200 Hz, pas 2400 Hz, 3600 Hz ou que sais-je. Allez-y vous, agitez les bras mille deux cent fois par seconde, juste pour glisser l’objet de votre désir dans un lit.
Il y a d’autres moustiques beaucoup moins poètes. Toxorhynchites brevipalpis, par exemple. Chez lui, mâle et femelle accordent leurs battements jusqu’à trouver la même fréquence. L’harmonie dans la fusion. Moins poète et moins tueur, puisqu’il n’a pas besoin de sang. Oublions-le. L’harmonique, comme dirait mon musicien préféré (et accessoirement mon frérot), c’est comme la polyrythmie. De la différence jaillit la grandeur!
PS. Tout ça à cause d’un papier de l’édition du 9 janvier de Science.
(1) Le Détecteur de clichés d’écriture de mon traitement de textes maison, fruit d’une collaboration avec Laurent Mauriac (ex Libé comme moi et co-fondateur de Rue89), râle de l’usage récurrent de cette expression.
(2) C’est une de mes madeleine de Proust. Elle me rappelle comment, en lisant l’épatant Anna et mister God, à la fin des années soixante-dix, j’avais découvert que la tonalité du bruit des insectes n’est pas autre chose que la fréquence de vibration de leurs ailes. Livre qui fut une contribution essentielle à ma vocation, plutôt précoce, de physicien. (Et aujourd’hui défroqué).
tres interesant .