Du Grenelle au néant, le pas est franchi

Cette fois, le cadre est fixé. Borloo a présenté en Conseil des ministres le projet de loi « Grenelle II », censé traduire dans les textes les engagements de la grande farce écolo-médiatique de 2007. Avec ce texte, la France prend un peu d’avance sur son allié américain, mais il y a fort à parier qu’Obama mettra les bouchées doubles dès son entrée à la Maison-Blanche dans une douzaine de jours. Rappelons que le Grenelle I, première partie de l’effort vert sarkozien n’est toujours pas passé devant les sénateurs.

Quel menu Borloo, NKM et leurs conseillers nous ont-ils concocté? 104 articles, 144 pages, ça en fait du papier. Il y a de tout. Un peu de bon, du moins bon, et aussi de grands vides. Passons en revue ce sommaire, et simplifions un peu plus le «guide simplifié» publié par le ministère de l’Ecologie.

Sur le bâtiment, premier levier de lutte contre le gaspillage énergétique. Désormais, les constructions livrées devront avoir reçu un certificat de conformité avec les normes énergétiques. Ah, ce n’était pas le cas?

En matière de logement, un propriétaire ne pourra plus s’opposer à des travaux de rénovation thermique votés par la propriété. Mais quid des immeubles où le propriétaire, unique, refuse toute dépense pour la rénovation? D’une manière générale, il manque un véritable dispositif permettant d’inciter, voire de contraindre, les propriétaires à améliorer l’isolation des logements mis en location. Pas simple puisque c’est le proprio qui paie et le locataire qui encaisse le fruit des économies, mais on attendait un peu d’imagination de nos gouvernants.

Je vous passe les articles de loi qui modifient le code de l’urbanisme. C’est particulièrement éprouvant à lire. Mais je relève quand même un bon point: un maire ne pourra plus s’opposer à un permis de construire parce qu’il trouve qu’un toit solaire c’est moche, sauf en zone protégée, of course. Un drôle d’article au passage: un immeuble très performant sur le plan énergétique pourra dépasser de 30% le coefficient d’occupation des sols. Un peu comme les écrans plats qui consomment moins au centimètre carré, mais qui comme ils sont plus grands consomment bien plus qu’un bon vieux tube cathodique. (On peut aussi lire cette phrase en remplaçant « écran plat » par « voiture », « centimètre carré » par « kilo » ,  « grands » par « lourd », et « tube cathodique » par « 4L »).

Les transports, maintenant. Compliqué les transports. On va voir fleurir un petit label d’écopartage. On va développer les péages sans barrière. L’air de rien, ça évite de trop freiner pour réaccélérer. Sur un trente tonnes, c’est un chouia de pétrole de gagné. D’ici 2010, les tarifs des péages seront modulés en fonction des émissions de gaz à effet de serre des camions. Sauf à me taper les 144 pages, le volet transport semble bien vide. De toutes les façons, s’il y avait un truc épatant, il serait imprimé noir sur blanc dans le «guide simplifié», non?

Passons à l’énergie et à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Les grosses entreprises, les collectivités importantes, devront faire des bilans de leurs émissions de gaz à effet de serre. Les réseaux de chaleur d’origine renouvelable (chaudières municipales à bois par exemple) seront favorisés. De même, les départements et les régions pourront produire et vendre de l’électricité renouvelable, comme les municipalités le pouvaient déjà. C’est maigre…

Sur la biodiversité (et la pollution au passage). La pub est enfin interdite pour les pesticides destinés aux particuliers. L’agriculture bio sera favorisée autour des zones de captage d’eau (par exemple en interdisant tout usage de phytosanitaires dans un rayon x autour). De même, on pourrait généraliser la présence d’une bande enherbée (et donc non aspergée de saloperies) de cinq mètres le long des cours d’eau. L’Etat renforcera la protection des 131 espèces en danger « critique » d’extinction sur le territoire français (et les autres, ont les laisse crever?). On note aussi la création d’un « schéma d’orientation minière » en Guyane pour promouvoir l’orpaillage respectueux de l’environnement. Il faudra expédier le lider maximo verde en pleine jungle pour expliquer ça aux orpailleurs clandestins…

Sur la mer, il n’y a rien de spectaculaire. Mais on note tout de même la création d’un label de pêche durable… Ça veut dire quoi? Qu’on labellise tous les produits pêchés dans le cadre de quotas qui pillent les ressources?

Bonne nouvelle, on va lutter contre la pollution lumineuse. (Au fait, msieur Borloo, tu peux rien faire pour le parking du tunnel sous la Manche qui emmerde riverains et migrateurs?). On devrait aussi améliorer le contrôle de la pollution aéroportuaire. Sonore et autre (ah la bonne odeur de kérosène brûlé dans la campagne autour de Roissy).

Sur les risques « potentiels », on note l’obligation de vendre les téléphones portables avec une oreillette, l’interdiction de la pub montrant des enfants de moins de 12 ans avec un portable, et, « possibilité » d’interdire la distribution d’objets radioélectriques aux moins de six ans. Ce n’était pas plus simple d’interdire la vente de portables aux moins de (douze, quinze, dix-huit) ans (rayer les mentions inutiles)?

Encore un point à signaler, et j’arrêterai ce catalogue insupportable à lire. Les gros producteurs de déchets organiques (marchés, cantines, restaurants, etc.) devraient se faire imposer une collecte sélective de leurs déchets en vue de produire du méthane et du compost.

Ouf, il y en aurait encore des trucs à dire. Mais je ne vais pas m’infliger ça. Pour voir la réalité des engagements Grenelliens du gouvernement, allez donc jeter un coup d’œil sur la carte des projets « non compatibles » recensés par l’Alliance pour la planète. J’adore tout partiulièrement celui d’un circuit de F1 dans les Yvelines, dans un coin où existait un projet de domaine d’agriculture biologique. Et n’oubliez pas de relire les discours enflammés de Sarkozy, Fillon et autre Lagarde sur le plan de relance. Ça confirme, si besoin en était, que le Grenelle était un miroir aux alouettes.

4 commentaires

  1. est ce que ça mérite un tel article ce dictionnaire d’ entourloupettes!

  2. Ah désolé , ne le prenez pas pour vous !
    Acceptez mes excuses


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