Le Luxembourg, ses banques et son gaz carbonique

La publication aujourd’hui des derniers chiffres d’émissions de gaz à effet de serre des membres de l’Union européenne ne révèle pas de surprise.L’Allemagne, le premier réchauffeur de planète de l’UE, notamment en raison de sa réunification avec l’économie à la soviétique de l’ex-RDA, est proche de réaliser son engagement pris à Kyoto, avec l’arsenal de mesures déjà en vigueur aujourd’hui. C’est surtout la production d’énergie, qui a massivement lâché le charbon pour le gaz, et une meilleure gestion de ses ordures qui expliquent cette performance, même si le pays reste un très gros émetteur de gaz carbonique par habitant.

La Grande-Bretagne fait mieux que l’Allemagne: elle est en avance sur le planning puisque ses émissions, en 2005, étaient inférieures à ce que le protocole de Kyoto lui impose à partir de 2008. Là encore, c’est le retrait du charbon devant le gaz qui explique cette performance, ainsi que le recours aux mécanismes de Kyoto, qui permettent de purger des comptes des émissions, en les compensant par achat de carbone sur le marché européen.

La France, qui est un modèle —nucléaire oblige— en terme de rejets de CO2 par habitant, n’est pas dans la bonne tendance. Sans prendre de nouvelles mesures (au fait, où est passé le Grenelle?), elle ne remplira pas ses obligations. Mais logiquement, selon l’Agence européenne de l’environnement, notre pays devrait se hisser dans les bons élèves en affichant une baisse de ses rejets entre 1990 et 2008

L’Italie, elle, est un mauvais élève: elle affichait une hausse de 12% entre 1990 et 2005, et n’attendra pas, en 2008, son engagement d’une baisse de 6,5%. Pire, la hausse permanente des rejets, à un rythme qui s’est fortement atténué, devrait —sans nouvelles mesures fortes— lui donner un bilan de 13,1% au lieu de -6,5% entre 1990 et 2008. Pas loin de vingt points d’écarts.

Je vous passe le détail des autres pays, vous les trouverez dans le rapport complet de l’Agence européenne de l’environnement.

En 1990, les émissions de la France s’élevaient à 10 tonnes (de gaz carbonique) par habitant et par an. Quinze ans plus tard, elle se trouve à 9,1 t/an. Dans le même temps, la Grande-Bretagne est passée de 13,5 à 10,9 t/an. Et l’Allemagne de 15,5 à 12,1 t/an. Le mauvais élève, comme en matière de transparence de réseaux financiers, c’est le Luxembourg. Chaque chaque habitant y a rejeté, en 2005, 28 tonnes de CO2 chaque année (contre 33 en 1990)… Le pays finira, en 2008, à 40 point au dessus de son engagement dans le protocole de Kyoto qui lui impose de réduire de 28% ses rejets!

Pour finir, plongeons-nous dans une fraction lourde de sens: celle qui consiste à calculer l’intensité de carbone d’un pays en divisant ses émissions par point de PIB, et à regarder leur évolution.

En fixant arbitrairement la moyenne de l’UE à 27 à l’index 100, on peut comparer les performances de chacun. Même si elle est très bien placée, la France ne peut pas revendiquer sa posture de leader européen (indice 74). Elle est devancée par la Suède (indice 59). En d’autre termes, le pays Scandinave émet nettement moins de gaz carbonique par unité de richesse produite. La Grande-Bretagne et l’Autriche talonnent la France (84) et l’Allemagne est dans la moyenne (101) tout comme le Luxembourg. Une preuve de plus que le secteur bancaire (45% du PIB) rapporte de l’argent, d’une part, et émet peu de gaz à effet de serre, d’autre part! Ce n’est pas mon confrère Denis Robert qui me contredira.

2 commentaires

  1. @ddq, un petit correctif à faire à votre texte: il ne s’agit pas ici d’émissions de gaz carbonique mais d’émissions de GES exprimées en équivalent gaz carbonique. . Si vous le dites au début de votre texte, vous l’oubliez ensuite. C’est ainsi que les émissions de CO2 de la France sont de 6,2 t/habitant et non de 9,1 comme vous l’indiquez. Rapelons que ,des principaux secteurs économiques, le premier producteur de GES en France est l’agriculture ( méthane, oxyde nitreux).

  2. Author

    Merci de cette précision. C’est vrai qu’on a un peu trop tendance à mélanger les deux. (Et parfois même carbone et gaz carbonique. Synonyme comme concepts, mais pas en tonnages!)

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