Pet de microbe fait rêver les chimistes

Cyanothece 51142 © Pacific Northwest National Laboratory
Cyanothece 51142 © Pacific Northwest National Laboratory

L’hydrogène est un gaz qui intéresse beaucoup de monde. Et pour cause: quand on le brûle dans une pile à combustible, il ne rejette que de l’eau. Ni polluants, ni gaz carbonique. Le problème, jusqu’à présent, c’est qu’il n’existe qu’à l’état de traces dans la nature. Il faut donc le produire, ce qui n’est ni facile, ni donné.

La solution propre, c’est de faire passer du courant électrique dans l’eau. Ça ne pollue pas, mais ce n’est pas efficace. L’autre méthode, c’est de l’extraire du gaz naturel (ou d’autres produits carbonés). C’est plus rentable que l’électrolyse, mais on se retrouve avec des gaz à effet de serre. Ce qui fait dire que jusqu’à présent, la voiture à hydrogène ne servirait qu’à épurer l’air des villes, mais sûrement pas à soigner le climat.

Bien évidemment, les recherches vont bon train, pour tenter de mettre des plantes ou des bactéries à contribution. Jusqu’à présent, on disposait de microbes capables de produire l’hydrogène à condition de les priver d’oxygène. Pas pratique, donc. C’est là qu’arrive Cyanothece 51142, découverte en 1993. C’est une cyanobactérie (on appelle ça aussi les algues bleues) douée de photosynthèse, comme les plantes. Mais C51142 n’est pas comme ses cousines, viennent de montrer des chercheurs américains. Le jour, en présence de lumière, elle capte le CO2 pour le transformer en oxygène et en glycogène. Et quand le soleil se couche, une enzyme capte l’azote de l’air pour en faire de l’ammoniaque, et libérer de l’hydrogène.

D’ordinaire, cette fixation de l’azote ne se produit qu’en l’absence d’oxygène, car celui-ci détruit l’enzyme. Mais Cyanothece 51142 a trouvé une astuce, sans qu’on sache pourquoi: elle brûle l’oxygène pour en tirer de l’énergie. Bref, elle fabrique de l’hydrogène même quand il y a de l’air.

Le plus étonnant, c’est que les chercheurs ont pu trafiquer son rythme biologique (sans subir les foudres des défenseurs des animaux). Après lui avoir fait subir un cycle jour-nuit de 12 heures, ils ont rallumé la lumière pendant 48 heures. Et là, surprise, la bactérie a repris sont activité nocturne en plein jour… et dopé sa production d’hydrogène. Ramenée à grande échelle (ce qui n’a pas été fait), la production serait de près d’un litre d’hydrogène par litre de bouillon de culture toutes les 48 heures… Il semble que cela soit le record, toutes bactéries « naturelles » confondues, mais à l’air libre.

Bon ce n’est pas demain la veille qu’on remplira des réservoirs grâce à ce sympathique organisme. Car les chercheurs, qui ont démarré avec une éprouvette de 25 ml de bouillon de culture, en sont pour le moment à 200 ml.

Source: Nature Communications du 14 décembre 2010 (DoI: 10.1038/ncomms1139)

4 commentaires


  1. Comme quoi la science peut trouver des solutions à tous nos problèmes !
    Mais dans combien de temps sera-t-elle opérationnelle ? Dans 10, 20 ou 30 ans, lorsque les conséquences des émissions de CO2 seront inéluctables …

    1. […] Le « saut technologique » nécessaire, que les politiques appellent de leurs voeux, ne profitera certainement pas au plus grand nombre. […]

  2. Les bactéries productrices d’hydrogène sont chose courte, mais effectivement en milieu dépourvu d’oxygène. Sans elle, la production de biogaz serait impossible. Pourquoi ne pas faire de l’hydrogène à partir de biogaz, comme on le fait à partir de gaz fossile?

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