Il a de la ressource, le maire de Moscou. Après avoir proposé il y a quelques années d’inverser le cours d’un fleuve, il avait promis un hiver sans neige à ses administrés (1). C’est raté, raconte le Global Post: il y a de la neige à Moscou. Luzhkov s’est offert les services de l’armée de l’air russe, chargée de disséminer des produits chimiques dans les nuages, pour provoquer des chutes de neige avant leur arrivée au dessus de la capitale.
En septembre dernier, Luzhkov avait annoncé qu’il tenterait de répéter le scénario appliqué chaque année pour les grandes fêtes: prendre le contrôle des précipitations à l’aide de cristaux d’iodure d’argent, voir de ciment en poudre… Les services de la mairie espéraient qu’une fois payée la facture de six millions de dollars pour disperser la poudre de perlimpinpin, l’absence de neige ferait économiser quatre millions sur le déneigement qui requiert chaque année cinq mille camions, et dix fois plus d’ouvriers.
Mais comme tout hiver qui se respecte, Moscou est bel et bien sous la neige. La journaliste du Global Post a tenté d’enquêter, en vain, pour savoir ce qui s’est passé. Elle a fini par dénicher l’interview d’un responsable du service fédéral d’hydrogéologie, dans les colonnes de Rossisskaya Gazeta, qui avance une double explication: la faute à de nouveaux gratte-ciels qui ont altéré les performances des radars météorologiques, la faute aussi aux vents. Quant à Luzhkov, il accuse un prévisionniste météo de ne pas avoir fait son boulot: il avait annoncé 1,2 centimètres de neige et il en est tombé quinze! Il invoque aussi des question d’organisation, ou plutôt de désorganisation. Selon le maire, les pilotes auraient besoin d’être prévenus deux semaines à l’avance, quand les chutes de neige restent imprévisible à 24 heures… C’est quand même marrant cette manie qu’on les responsables de pays totalitaires —ou presque totalitaires— de se prendre pour les Dieux du ciel.
(1) C’est Time qui racontait ça en octobre dernier: Luzhkov avait proposé en 2002 de faire couler l’Ob à l’envers, pour irriguer l’Asie centrale, rien que ça!
Plus qu’une «manie qu’ont les responsables de pays totalitaires de se prendre pour les Dieux du ciel», je pencherais plutôt pour une «foi aveugle en la toute-puissance de la technologie moderne.»
La différence, c’est que cette dernière croyance est partagée par beaucoup plus de monde que les quelques responsables de pays totalitaires. En l’occurrence, l’essentiel de la population des pays riches (ou un peu moins). Et cette croyance concerne aussi la capacité de la technologie à résoudre à peu près n’importe quel problème grave auquel nos sociétés pourraient être confrontées aujourd’hui ou à l’avenir.
Car, même si contrairement à Luzhkov, l’essentiel de la population des pays riches se gausserait aujourd’hui à l’idée que l’on puisse imaginer être capable de modifier le temps localement, je ne suis pas sûr que cela reste le cas pendant encore des années (elle pourra tout autant y croire lorsqu’on lui aura montré suffisamment de fois que la technologie a réellement réussi à provoquer des pluies qui n’auraient pas eu lieu sinon, par exemple en Afrique ou en Chine ; mais, évidemment, en oubliant soigneusement de lui préciser dans quelles conditions météorologiques préalables…)
Bref, il y a un gouffre entre la grande puissance et la toute-puissance de la technologie…
Bonjour et bonne année à tous !
Cela montre une fois de plus que les humains au pouvoir ne peuvent s’empêcher de péter plus haut que leur cul !
Sinon, a-t’on une idée des conséquences sur l’environnement de telles pratiques mégamégalo !!?