La vie à Concordia: le «doc» répond.

© Denis Delbecq
© Denis Delbecq

Bonjour Denis,
Je me permets une réaction au texte que tu as publié en explication du retrait de l’article de Laura. Libre à toi de le publier ou non.

Ce témoignage personnel que tu dis riche, rare et brutal, était aussi, ne l’oublions pas, insultant, inquiétant et purement subjectif. Elle y faisait état d’une réalité que peut être elle-même ressentait au moment où elle a écrit ce texte, mais qui était loin d’être représentatif de la station. Ses propos xénophobes et méprisants ont en effet été mal vécus. Ils ont aussi eu des conséquences fâcheuses sur l’ambiance régnant à Concordia. Tu es un journaliste professionnel et tu mesures tes écrits, tu essayes d’être objectif, et tu connais les conséquences que peuvent avoir tes textes. Ce n’est le cas d’aucun d’entre nous. Si tu écris un article polémique qui sera mal pris, le soir, tu rentreras chez toi, point. Si à Concordia, tu insultes ouvertement tes co-hivernants, tu devras affronter leurs regards tous les jours, tous les matins, tous les midis, tous les soirs ; il n’y aura nulle part où tu pourras vraiment te réfugier, à part dans les quelques mètres carrés de ta chambre, et encore… Alors en plus si tu ne penses pas vraiment ce que tu as écrit, si tu l’as fait, comme c’est le cas de Laura, dans un moment de détresse, dois tu continuer à en subir les conséquences ? Dois tu continuer à affronter le regard de gens que tu as insulté et qui serait prêts sans aucune hésitation à sortir te secourir si tu avais un problème à l’extérieur et que tu étais incapable de rejoindre la base ?
La vie à Concordia est dure, certains l’assument mieux que d’autres. Mais au risque de te décevoir, les héros polaires, ça n’existe pas. Tous ces hommes et toutes ces femmes vivant dans les milieux extrêmes ne restent que des êtres humains, tout simplement. Nous avons comme vous tous nos qualités et nos défauts, et vivre dans un milieu confiné, coupé de tout et tous, nous fait porter une attention plus particulière aux autres, à leur comportement, et entraîne ce que tu appelles des bisbilles. C’est un comportement humain normal, tout simplement. Mais ne t’inquiètes pas pour nous, Concordia n’est pas comme tu le crois un « enfer humain ».
Je finirais en citant Cook lui-même, puisque Laura citait également les pionniers de l’aventure polaire dans son article : « The curtain of blackness which has fallen over the outerworld of icy desolation has descended upon the inner world of our souls. Around the tables, in the laboratory, and in the forecastle, men are sitting about sad and dejected, lost in dreams of melancholy from which, now and then, one arouses with an empty attempt at enthusiasm. »
Mais pour nous le soleil est revenu, et bientôt nous retrouverons nos foyers, nos amis, nos familles et nos vies, qui ne seront plus jamais les mêmes.

Eric Lotz

6 commentaires


  1. C’est grave d’en arriver là ! il y a des responsabilités à trouver et pas seulement des excuses à signifier…

  2. Et oui, monsieur Delbech, Doc a raison ! j’ai des échos directs de la base Concordia, ils sont trés différents de ce que j’ai pu lire selon Laura !!! Au lieu de vous offusquer bêtement , renseignez-vous auprés des 11 autres personnes avant de commenter ce que vous ne connaissez pas !! les paroles de Laura étaient en effet méprisantes, insultantes et xénophobes, c’est bien ainsi que je les ai ressenties. Je pense que le groupe a suffisamment de bon sens pour démeler cette histoire sans nécessiter votre intervention mal venue, votre parti pris, et cette intolérance propre à la plupart des journalistes……. La vie à COncordia ne vous intéresse plus ? tant pis pour vous ! vous rentrerez donc dans la catégorie de gens si bien décrite par Laura ! Adieu donc, et sans regrets !

  3. Bonjour,

    Me voilà sur Effets de Terre, à découvrir une sorte de polémique. Etant donné que je n’en connais pas la raison, si ce n’est à travers les propos de Françoise qui décrit qu’une hivernante a émis des propos pour le moins inconvenants, et pour avoir suvolé ce qui m’a semblé un billet d’humeur du rédacteur, je ferai peut-être mieux de me taire également.
    Cependant, mon amour pour les zones polaires et les grands espaces, mon admiration pour les hivernants du Grand Sud me donnent envie de partager mon expérience.
    J’ai vécu plus d’un an dans le Grand Nord, et je comprends et ressens très bien certains propos de la réponse de Eric Lotz. Je sais aussi, très modestement, que celui ou celle qui n’a jamais expérimenté de vivre en zone polaire ne peut pas savoir ce que cela représente.
    Je le sais pour l’avoir vécu.
    Vivre dans ces zones extrêmes est une chose très particulière, qui marque à jamais un être humain. Malgré la force qui nous habite, paradoxalement, notre petitesse est évidente, là-bas plus qu’ailleurs. Une toute petite chose peut parfois prendre des proportions extrêmes, à tel point que l’on ne se reconnait pas vraiment. Il peut advenir une extrême sensiblerie à l’autre, une extrême fragilité induite par des conditions de vie hors normes, ou très différentes de celles que l’on connait en temps ordinaire.
    On doit bien sûr, dans ces conditions, travailler sur soi-même afin de traverser toutes ces choses bizarres que l’on ne ressent pas habituellement, de part le milieu de vie.
    C’est ce que j’ai compris et appris pour ma part. Ce que j’ai compris aussi, c’est qu’un tel séjour ne se prépare jamais assez, d’un point de vue psychologique. Il est nécessaire de savoir exactement pourquoi l’on part, d’effectuer une introspection exigeante, voire même de se créer une ligne comportementale qui aidera.
    Pendant mon séjour dans le Grand Nord, j’ai compris qu’il ne faut pas résister à ce qui apparait comme problème, j’ai compris qu’il fallait apprendre à accepter sa propre difficulté, à savoir se pardonner ses faiblesses et à faire de même envers l’autre car là-bas, à part la Vie, l’Autre est tout ce que l’on a…
    Le choc des cultures peut s’avérer délicat. Le voir comme une richesse qui nous arrive est une merveilleuse option.
    Je vous souhaite à tous, à Concordia, à DDU ou ailleurs dans ces belles et dures terres polaires, de merveilleux instants de vie ensemble.

  4. Bonjour,
    Merci d’enlever mon adresse e-mail !
    Bien à vous

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