Le Sommet international du pétrole, un vrai caf’conc’

 Etats-Unis, vu par David Strother. C'est la découverte du pétrole qui a sauvé les baleines © DR
Débarquements de barils d'huile de baleine en 1860 aux Etats-Unis, vu par David Strother. C'est la découverte du pétrole qui a sauvé les baleines © DR

Il y a de vrais pitres à l’OPEP, il ne leur manque plus que le nez rouge. Prenez Abdallah el-Badri, le secrétaire général. Il en a aligné de bien bonnes lors du Sommet international du pétrole qui se tenait à Paris. Selon Les Echos, el-Badri a expliqué que la dégringolade des cours du pétrole depuis l’été 2008 équivalait à un plan de relance mondial de 2000 milliards de dollars, dont 800 auraient été financés par les pays de l’OPEP… Quelle générosité!

Remarquez, il y a plus drôle. Ce grand comique d’El-Badri a aussi affirmé que le pétrole n’est pas responsable du réchauffement climatique. «Ce sont les pays industrialisés qui produisent toute cette pollution dans le monde.» Version moderne du célèbre «Responsable mais pas coupable» de Georgina Dufoix dans l’affaire du sang contaminé.

Margerie, le moustachu patron de Total, y est allé de son diagnostic: «L’économie ne peut pas supporter un cours du pétrole au dessus de 50 dollars.» Et pouf, le cours du brut a grimpé de quatre dollars, et refranchi à Wall Street ce seuil de l’insupportable. Quant à El-Badri, il a indirectement répondu à Margerie que l’OPEP peut certes survivre avec un cours de 50 dollars, mais que l’organisation préférerait 75 dollars. Autrement dit, ses douze membres —des apôtres?— aimeraient bien récupérer une partie de la subvention qu’ils ont généreusement offert à l’économie mondiale, subvention décrite un peu plus tôt par El-Badri… Généreux, mais pas fous les géants du pétrole, surtout quand ils vivent dans le Golfe Persique, où les coûts de production étaient de 3-4 dollars le baril en 2004 (1). A supposer qu’ils aient triplé depuis (ce qui reste à prouver), ça laisse plus de trente billets (verts) de cash par baril. (A multiplier par des millions de barils tous les jours…)

Finalement, il devait être très émouvant ce grand sommet international de l’or noir, dommage que la presse française n’en a pas fait état, à l’exception des Echos. Il y avait même un autre grand comique, le patron de Shell, qui a évoqué ses années étudiantes à bord d’une 2CV. «On n’a pas besoin d’un Hummer pour être heureux.» Un proverbe taillé sur mesure pour l’administration Obama qui pourrait avantageusement remplacer le «In god we trust» des billets verts.

(1) World Energy Outlook 2005, Agence internationale de l’énergie. Un baril vaut 159 litres. Héritage des débuts de l’exploitation pétrolière où on stockait le brut dans des barils de harengs de récup’. Si j’en crois ce document d’un professeur américain et quelques autres, le roi Edouard IV d’Angleterre avait, en 1482, normalisé à 35 gallons (britanniques), soit 159 litres, le volume de ces barils pour éviter les arnaques des vendeurs de harengs. Barils préférés au barriques de bière et de vin pour des raisons obscures par les premiers exploitants pétroliers de Pennsylvanie (selon les sources américaines) ou d’Alsace (selon des sources françaises).

8 commentaires

  1. Au-delà des pitreries en question, il faut bien se rassurer, le coût d’extraction du pétrole Saoudien est effectivement de l’ordre de 5 dollars le baril, encore actuellement, mais le problème est qu’il s’épuise ( on entend dire çà et là que son pic de production vient d’être dépassé, et que pour le remplacer on ne trouve plus guère que du pétrole dont le coût d’extraction est d’au moins 40 dollars le baril. Comme il faut bien payer le transport, les frais de commercialisation et les intérêts des emprunts, cela met à 50 dollars le baril le coût du « nouveau  » pétrole. Beaucoup de projets ont été différés à cause de cela. Le déclin de la consommation étant somme toute assez faible (moins de 5 % pour l’instant), que va-t-il se passer si rien n’est fait rapidement pour la réduire de façon importante et durable?

  2. Que penser d’un G20 qui n’a pas été capable de faire un diagnostic sérieux de la crise mondiale ? Peu de bon ! La finance devrait-être considérée comme la cerise sur le gâteau d’une économie basée sur la pétrocroissance, une économie incapable d’économiser et qui a baigné dans l’illusion du court terme et de la croissance perpétuelle. Le plus important ce sont les flux physiques et non pas les flux d’argent.

    En 2004, le prix du pétrole a commencé à monter. En 2005, les prix des matières premières ont commencé à monter. En 2006, les prix des denrées alimentaires ont commencé à monter. L’approvisionnement a commencé à ne plus satisfaire la demande et cela a entamé les perspectives de croissance. L’endettement américain a permis de sauver la face un temps et puis se fut la fin du crédit. Actuellement, c’est le processus de destruction de la demande et des investissements qui est en marche, et qui nous dépasse, ce qui confirme l’idée que l’offre ne sera plus jamais aussi généreuse qu’elle ne l’a pu l’être jusqu’à maintenant.

    Serait-on en train de regarder dans le mauvaise direction ? Cela ne serait pas la première fois mais d’autant plus dommageable cette fois-ci. En tous cas, personne n’est dupe, on se doute bien que les prochains chocs énergétiques feront très mal à ce qui restera de l’économie mondialisée !

    http://contreinfo.info/article.php3?id_article=1643
    http://fr.ekopedia.org/La_fin_du_pétrole_approche

  3. Et qui plus est, vive le pétrole cher, pour que les projets en ENR soient plus rentables, pour que la consommation de pétrole baisse (comme pour tous les chocs pétroliers) et pour décarbonner notre énergie.

  4. Il ne faut pas s’y tromper, la baisse du pétrole est uniquement dû à la « crise » actuelle, disons pour éviter d’utiliser le jargon « catastrophe » que l’on voit dans les journaux , la baisse de la demande pétrolière… et pas du tout à une organisation qui depuis les années 70 n’arrive pas à respecter les quotas qu’elle met en place ( dans le dernier rapport mensuel de l’AIE, il est souligné que les taux de respect des quotas seraient de 80%, ce qui apparaît exceptionnel …. ).
    Non, ce qui est plus gênant dans les prix et la situation actuelle , c’est qu’on est en train de passer à côté de la révolution écologique qu’on nous promettait , les prix incitent ou plutôt desincitent les décideurs, les groupes pétroliers et autres grands groupes à chercher de nouvelles énergies. Les plans de relances divers et variés des pays de l’OCDE ont récemment été évalués comme peu voire anti-écolgique…(on s’en doutait non ? pas vous ? ) La baisse du prix du pétrole est non pas un formidable cadeau de l’OPEP ou plutôt de la crise actuelle … mais plutôt un cadeau empoisonné pour notre civilisation… en tout cas si on veut une vrai révolution !
    Si l’energie chère est dangereuse, parce qu’ele rend certain projet des pétroliers rentables ( les sables bitumineux de l’Alberta par exemple … ) elle est aussi une formidable occasion de développer certaines energies renouvelables ( et j’ai bien dit RENOUVELABLES, pas l’energie nucléaire ou encore ces foutus agrocarburants …. )
    Alors Vive l’energie chère, qu’on arrête de tuer notre planète …

  5. Que penser d’un G20 qui n’a pas été capable de faire un diagnostic sérieux de la crise mondiale ? Peu de bon ! La finance devrait-être considérée comme la cerise sur le gâteau d’une économie basée sur la pétrocroissance, une économie incapable d’économiser et qui a baigné dans l’illusion du court terme et de la croissance perpétuelle. Le plus important ce sont les flux physiques et non pas les flux d’argent. Le fin de la croissance resulte surtout de la tension entre l’offre et la demande ces dernières années.

    En 2004, le prix du pétrole a commencé à monter. En 2005, les prix des matières premières ont commencé à monter. En 2006, les prix des denrées alimentaires ont commencé à monter. L’approvisionnement a commencé à ne plus satisfaire la demande et cela a entamé les perspectives de croissance. L’endettement américain a permis de sauver la face un temps et puis se fut la fin du crédit. Actuellement, c’est le processus de destruction de la demande et des investissements qui est en marche, et qui nous dépasse, ce qui confirme l’idée que l’offre ne sera plus jamais aussi généreuse qu’elle ne l’a pu l’être jusqu’à maintenant.

    Serait-on en train de regarder dans le mauvaise direction ? Cela ne serait pas la première fois mais d’autant plus dommageable cette fois-ci. En tous cas, personne n’est dupe, on se doute bien que les prochains chocs énergétiques feront très mal à ce qui restera de l’économie mondialisée !

    Annexe1 – contreinfo.info/article.php3?id_article=1643
    Annexe2 – fr.ekopedia.org/La_fin_du_pétrole_approche

  6. La destruction de la demande actuelle va de paire avec la destruction de l’offre de demain.
    Le prix dérisoire de l’huile porte sérieusement atteinte aux investissements susceptibles de maintenir un débit satisfaisant à notre civilisation énergivore. Nous perdons un temps monstre ! Une épée de Damoclès pend au dessus de notre ‘pouvoir’ d’achat, cela prendra la forme d’une hyper inflation qui sera bien plus sévère que les atteintes précédentes faites ces dernières années à notre ‘pouvoir’. A ce sujet le débat gauche droite est complètement à côté de la plaque et scandaleux, voire criminel. Nicolas Hulot avait vu clair avec le ‘Syndrome titanique’, et il a aussi vu juste en ne s’impliquant pas davantage en politique. Nous sommes de véritables paumés en devenir ! Dans le même sens je conseille à tout le monde le livre de Janco : C’est maintenant ! : 3 ans pour sauver le monde (Broché).

    Un lien parmi tant d’autres dont je rêverai que nos dirigeants prennent connaissance :
    “Crude Oil $200, the Price for Wasting Financial Crisis Opportunity”

  7. En effet, très intéressant le livre de Jancovici. J’ai trouvé que le fil conducteur (le parallèle avec l’ïle de Pâques) faisait bien son effet. Je pensais d’ailleurs proposé ma candidature aux différents partis pour le poste de « dictateur gentil qui sauve la France, enfin le monde quoi, de sa folie énergivore » mais ma modestitude m’a finalement contraint à faire machine arrière ;-).
    Pour le lien ça devait être celui-ci non ? http://www.marketoracle.co.uk/Article9913.html

  8. @Nimch. Le fil conducteur est en effet très bon, il donne envie de lire le livre de Jared Diamond.
    « Effondrement : Comment les sociétés décident de leur disparition ou de leur survie (Broché). »

    Un phrase du livre de Jancovici parmi d’autres : « Ce qui nous a « civilisés » en apparence depuis cinquante ans, est-ce la conséquence d’un changement génétique, ou simplement le fait que nous vivons depuis deux générations dans l’abondance matérielle croissance, et qu’il y a de la place pour tout le monde et toutes les aspirations sociales d’augmentation de ses revenus sans gêner quiconque à court terme ? »

    Le site que vous citez est le bon, il s’inspire de nombreuses analyses faites sur le très bon site internet : The oil drum

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