L’importation, arme fictive contre le réchauffement

On s’en doutait, mais rien de tel qu’une paire de chiffres pour se rafraîchir la mémoire. La moitié de la hausse des émissions de gaz carbonique liées aux exportations chinoises est à mettre au compte des pays développés (1). Au final, le tiers des émissions chinoises seraient imputables aux exportations de l’usine du monde.

Le Guardian a vendu la mèche, alors que les travaux ne sont pas encore publiés par les Geophysical research letters. C’est une équipe norvégienne, au Centre for International Climate and Environmental research d’Oslo (CICERO), qui signe le papier à paraître. Il montre une nouvelle fois que le mode de calcul des émissions de chacun fixé par l’ONU est biaisé. Selon le Guardian, qui cite une autre étude, la Grande-Bretagne a réduit de 18% ses émissions suivant les critères de Kyoto, alors qu’en prenant en compte le gaz carbonique virtuel (émis bien réellement dans le pays producteur et pendant le transport), et en soustrayant celui lié aux exportations britanniques, les émissions totales du pays auraient cru de 20% depuis 1990.

Sur le site du CICERO, une note signée de Glen Peters, l’un des auteurs de l’article à paraître, donne l’exemple de la Norvège. Sur la base de l’année 2000, Peters explique que les émissions de gaz à effet de serre liées aux importations norvégienne représentent les deux-tiers des émissions officielles du pays… Plus intéressant, Peters souligne que la moitié de ces émissions importées viennent de pays du tiers-monde et ne représentent que 10% de la valeur des biens importés. Si les mêmes produits avaient été fabriqués en Norvège, un pays où l’électricité hydraulique est abondante, ils auraient rejeté deux fois et demi moins de gaz à effet de serre. L’électricité chinoise émet, selon Peters, deux cent fois plus de carbone que l’électricité norvégienne…

Il va de soi qu’on n’arrête pas la mondialisation et les délocalisations du nord vers le sud. Mais tout cela prouve l’urgence d’une coopération renforcée pour que les pays riches aident les pays en développement à décarboner leur économie. Et cela démontre aussi, qu’il n’y aura pas de réduction des rejets de gaz à effet de serre si les pays importateurs ne favorisent pas l’achat de produits pauvre en carbone. A quand une TVA repensée en fonction du carbone contenu dans les produits (et dans celui rejeté quand on les utilise)?

(1) Suite à un échange de mail avec Glen Peters, j’ai corrigé cette phrase dont le sens donné par la version provisoire de son article était erroné.

2 commentaires

  1. A quand une TVA repensée en fonction du carbone contenu dans les produits (et dans celui rejeté quand on les utilise)?
    ===

    Hé bé comme quoi on est d’accord sur l’essentiel!

    Serais-je assez vache pour rappeler que, selon Tilleul, une taxe sur le carbone fait augmenter les émissions de carbone?

    Oui!

    🙂

  2. On a déjà mis en place une taxe carbone par le passé ça s’est appellé l’augmentation du prix des matières premières (gaz, pétrole, charbon). Le moins que l’on puisse dire c’est que l’influence sur les émissions de gaz à effet de serre n’ont pas été très convaincantes…

    La taxe carbone c’est qu’on appelle de la « voodoo economics »(*)… Voodoo parce que ça part de la même croyance que si on proposait de diminuer les émissions de gaz à effet de serre en demandant à un sorcier vaudou de sacrifier un poulet à un quatre-chemins.

    Déjà on ne taxe pas les émissions de gaz à effet de serre, on taxe un indicateur dont on espére qu’il sera une représentation fidèle des émissions de gaz à effet de serre. En pratique ce qu’on constate c’est qu’il n’existe aucune standardisation du calcul des émissions de gaz à effet de serre, en pratique le nombre d’hypothèse est tellement ridiculement élevés qu’il suffit que le commanditaire demande une hypothèse pour qu’elle se réalise. La plupart des mesures de carbone qui ont été mis en place sur les produits agricoles accordent d’ailleurs une importance exagérée au « food miles » mais quasiment rien sur les conditions de culture. D’ailleurs Nicolas Sarkozy a plusieurs fois indiqué au cours de ses discours électoraux que sa vision de la taxe carbone c’est une taxe qui est basse pour les produits français et élevée pour les produits étrangers, c’est effectivement ce qui s’est passé avec le bonus/malus pour l’automobile qui ne prend en compte que les critères qui sont déjà remplis par les constructeurs français et laissent de coté ce qu’ils ne peuvent pas faire…

    Taxer les importations et subventionner les exportations c’est le mécanisme de propagation de la crise de 29… On est dans l’irresponsabilité la plus totale…

    La taxe carbone est aussi encore moins engageante que le cap & trade de Kyoto (qui ne marche pas non plus!). Dans le cap & trade on fixe une limite maximum aux émissions de gaz à effet de serre, une fois que ce quota est remplie on doit arrêter… Dans la taxe sur le CO2 il est toujours possible de passer au-dessus du moment qu’on peut payer.

    Si une taxe carbone est trop élevée elle provoque une crise économique, si elle est trop basse on continue à émettre du CO2. Qui va être chargé de définir le juste taux de cette taxe ? Le peuple, ses représentants, les entreprises (petites ? moyennes ? grandes?), des experts (dans quelle discipline ? choisis par qui ?), etc, etc… Allez je lance un sondage, quel devrait être le prix de la tonne d’équivalent CO2 ?!

    Je range ceux qui sont pour la mise en place d’une taxe carbone dans la catégorie des idiots utiles de ceux qui ne cherchent qu’à gagner du temps en prônant le statu quo… J’imagine que pas un de ceux-ci n’imagine que dans les 10 prochaines années une révolution technique va permettre de nous tirer d’affaire alors pourquoi alore penser qu’il est possible de se tirer d’affaire juste avec un peu de « socio-ingénierie »

    Est-ce que la bombe atomique est arrivé en taxant la poudre à canon ou avec le projet Manhatan ? Est-ce que la reconstruction de l’Europe a eu lieu en taxant les ruines ou par le plan Marshall ?

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