Au secours, des écologistes à l’OCDE

Monsieur Sarkozy, faites quelque chose. L’OCDE est en train de devenir un groupuscule de dangereux fanatiques de la deep-ecology. Allez-voir sur place, puisque le siège est à Paris, ça ne dégagera que quelques centaines de grammes de CO2. Vous pourrez éteindre l’incendie qui couve dans le cerveau des experts de l’organisation internationale, plus connue pour son amour de la croissance à tout crin: ces derniers se permettent de critiquer, durement, la course aux agrocarburants engagée aux Etats-Unis, en Europe et ailleurs. Leur dernier rapport est titré «Biocarburants: le remède est-il pire que le mal?»

Morceaux choisis: «Le litre d’essence économisé parce qu’une personne marche, utilise son vélo, utilise le co-voiturage ou fait régler plus souvent son moteur est un vrai litre d’essence. Il s’obtient à coût bien plus faible qu’en subventionnant de nouvelles sources d’approvisionnement inefficaces.» Pire, selon l’OCDE, le caractère «durable» des agrocarburants serait un leurre: «L’expansion de l’usage des biocarburants crée des tensions insoutenables qui vont perturber les marchés sans apporter de bénéfices significatifs pour l’environnement.» Sans compter la hausse des prix des matières premières alimentaires. Et ce n’est pas tout: «Tant que [la qualité d’un] environnement n’est pas évaluée à son juste prix sur le marché, il y aura de puissantes incitations à remplacer les écosystèmes (forêts, zones humides et prairies) par des cultures à vocation énergétique.»

Les tableaux dessinés dans le rapport d’une soixantaine de pages sont éloquents: l’impact environnemental des agrocarburants apparaît très supérieur à celui des carburants fossiles. Ce serait le cas de la plupart des biodiesels (betterave, palme, soja), et de l’éthanol de maïs. Les seuls agrocarburants qui mériteraient le titre de biocarburant aux yeux de l’OCDE sont l’éthanol de sucre brésilien, la fermentation de déchets (méthane), et l’huile végétale… recyclée. Voilà qui plaira aux spécialistes de l’association Roule ma frite!

L’OCDE critique aussi les barrières douanières (taxes d’au moins 25%) érigées par ses membres producteurs d’éthanol. Mais là, on oublie l’environnement, on revient au business. La critique est seulement fondée sur le coût, nettement moins élevé, de la production d’éthanol dans les pays tropicaux… On ne se refait pas.

L’organisation demande donc aux gouvernements de cesser de subventionner les agrocarburants, et de remplacer ces aides par un système de taxation du carbone qui «laissera le marché déterminer le meilleur moyen de réduire les émissions de gaz à effet de serre». Le coût de la tonne de gaz carbonique évitée par les agrocarburants dépasse parfois les 500 dollars aux Etats-Unis, dix fois plus en Europe, insistent les experts de l’OCDE…

Image © DDq

3 commentaires

  1. Si je me fie à ce qui est marqué au début du document :

    « This document is prepared on the responsibility of the Chair of the Round Table on Sustainable Development at the OECD. The opinions expressed and arguments employed herein do not necessarily reflect the official views of the OECD or of the governments of its Member countries. »

    Il ne s’agirait pas plutot d’un document de travail de l’OCDE plutot qu’un rapport de ladite organisation ?

    Ceci dit s’il suffisait à un économiste de critiquer les énergies renouvelables pour être écologistes alors ceux de l’administration Reagan aurait mérité le Ashden award…

    Je rappellerais quand même l’avis de Claude Mandil (agence internationale de l’énergie) : les politiques actuelles de biocarburants dans le monde ont des objectifs agricoles et non énergétiques. N’en déplaise aux multinationales de l’écologie…

  2. Author

    Effectivement, comme tous ces rapports qui émanent de grandes organisations gouvernementales. Il n’en reste pas moins que ce document est une grande première. Quand aux agrocarburants (et non biocarburants, j’ai banni ce terme) ils relèvent effectivement de la politique de soutien à l’agriculture et à l’industrie pétrolière et non à une quelconque envie de sauver la planète.

  3. Une grande première ?!

    Ca fait depuis les années 70 que les grandes organisations économiques reçoivent des rapports (systématiquement contredits par les faits) prédisant que les énergies renouvelables ne peuvent résoudre les problèmes énergétiques mondiaux… et donc qu’il faut faire avec les énergies fossiles…

    On rest toujours dans le crédo « there is no alternative », à part que là c’est de plus en plus cynique puisque l’idée développée dans les pays industriels (et de plus en plus présente dans l’opinion si j’en crois les enquêtes qui sortent) c’est : on est foutu, on peut rien faire alors à quoi bon ?

    Quand il y aura un rapport qui reprendra les arguments des écologiques (les vrais) qui se tuent à montrer et à démontrer qu’il est possible de nourrir et de transporter l’humanité à partir de la biomasse dès qu’on arrête de prendre les champs pour des usines, à ce moment là on pourra parler de grande première…

    Ce rapport c’est encore des cartouches pour le lobby des carburants liquides à base de charbon…

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