Voir les scientifiques sortir de leur laboratoire pour prendre parti publiquement sur la scène politique n’est pas si courant. Et pourtant, plus de deux cents chercheurs du monde entier ont signé un appel aux négociateurs de Bali, leur demandant d’agir rapidement et fortement sur le réchauffement climatique. Un document qui prend d’autant plus de poids —même s’il ne fait à aucun moment référence à cela— que la communauté scientifique qui participe au groupe de l’Onu sur le climat reçoit, comme Gore, son prix Nobel de la paix aujourd’hui.
«De manière à rester en dessous des 2°C de réchauffement, les émissions mondiales doivent atteindre leur plus haut niveau puis décroître au cours des 10 à 15 prochaines années, il n’y a donc pas de temps à perdre», écrivent les chercheurs qui soulignent la nécessité —sur les bases scientifiques actuelles— de réduire d’au moins 50% les rejets de gaz à effet de serre, par rapport à ce qu’ils étaient en 1990. Ce qui signifie, pour les pays riches, de réduire d’un facteur quatre (pour la France, par exemple) à cinq (Etats-Unis) leurs propres rejets, et pour les pays en développement de s’inscrire aussi, à long terme, dans un processus de réduction…
Le premier document sorti des discussions pose le débat exactement dans ces termes. Le «draft» rédigé par des représentants d’Indonésie, Afrique du Sud et Australie, souligne que les nations développés devront —dans un premier temps— réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 25 à 40% en 2020 (calculés comme toujours par rapport à 1990), estimant que les efforts actuels ne permettent pas d’y arriver. Mais le document de travail estime aussi que toutes les nations devront participer à l’effort. Les pays en développement, comme les Etats-Unis, même s’ils ne sont évidemment pas cités.
L’Australie, nouveau leader politique du combat contre le réchauffement après le changement de régime et la ratification du protocole de Kyoto, reconnaît donc implicitement que les pays du sud devront conduire des plans d’actions contre le réchauffement qui «limitent la croissance de leurs émissions, voire les réduisent», mais sans pour autant s’imposer des objectifs chiffrés. Le draft fixe comme première priorité dans ces pays l’éradication de la pauvreté. Bref, tout ce que réclament les grands émetteurs de carbone (Chine, Inde, Indonésie, Brésil). Et tout ce que refuse par avance l’administration Bush. Il y a fort à parier que le document commun qui sortira de Bali, si document il y a, ne portera plus aucune trace de pourcentage… D’ailleurs, la réponse américaine ne s’estpas faite attendre. Ce lundi, le négociateur en chef américain a refusé tout objectif chiffré…
Cette seconde semaine de négociations, qui devrait notamment s’appuyer sur le draft, verra aussi le défilé des responsables politiques et ministériels. Gore, qui reçoit ce lundi son Nobel de la paix, filera ensuite vers l’Indonésie. Il devrait profiter de sa tribune suédoise norvégienne pour, une fois encore, renouveler son appel. Le nouveau patron de l’Australie devrait lui aussi, dès son arrivée mardi, s’exprimer haut et fort pour rappeler aux Etats-Unis leur total isolement. Après avoir longtemps tenu le porte-voix, l’Europe se fait bien discrète, du moins sur la place publique…
Juste une petite chose histoire de vous titiller Al Gore recoit son prix nobel à Oslo en Norvège et non en Suede …
Amicalement