Vous en êtes étonnés? Cela ne s’arrange pas sur le front de la planète. Le quatrième rapport «Perspectives globales de l’environnement» (GEO-4) du programme des Nations-Unies pour l’environnement ne fait pas dans l’optimisme.
Certes, vingt ans après le premier rapport des Nations-Unies sur le sujet, «Notre futur commun», le monde a fait quelques petits pas: 95% des émissions de gaz destructeurs de la couche d’ozone ont été éliminées, les entreprises achètent et vendent des droits à polluer sur des bourses du carbone, et les surfaces protégées ont grimper au point de couvrir 12% de la planète, rapporte le GEO. Mais le bilan est maigre faces aux clignotants qui sont passés par dizaines au rouge.
Stocks de poissons en chute libre, pertes de terres fertiles, réduction de l’eau douce disponible, qualité de l’air urbain en chute libre en Asie, réchauffement climatique… Peu de raison d’être optimiste sur une amélioration de la situation, notent les experts de l’ONU. Ils calculent que chaque être humain a aujourd’hui une emprise de 21,9 hectares sur les ressources naturelles quand la planète bleue ne peut en offrir que 15,7 hectares. On pêche aujourd’hui deux fois et demie plus de poissons dans les océans que les quantités compatibles avec la survie des espèces…
Bien évidemment, la priorité des priorités est devenue le climat de la planète. Là-dessus, même notre Président est d’accord, comme l’a montré son people-show élyséen avec Al Gore et Wangari Mataï, tous deux prix Nobels de la paix, en guest stars.
Le Geo trouve peu de raisons d’être optimiste:«[…] s’attaquer aux causes sous-jacentes des pressions environnementales affecte souvent les intérêts de groupes puissants capables d’influencer les décisions politiques», soulignant aussi combien cela a pesé dans le refus de certains pays de ratifier le protocole de Kyoto.
Ailleurs, on peut lire «Aucun des problèmes majeurs soulevés dans [le rapport] Notre futur commun ne connaît de prévisions d’évolution favorables.» Et les experts soulignent la hausse de 18% en vingt ans de la consommation d’énergie par tête de pipe aux Etats-Unis et au Canada, la baisse de la production alimentaire par habitant en Afrique (12% depuis 1981). Avec un premier conflit, au Darfour, qui trouve ses racines dans la dégradation de l’environnement et la diminution importante du niveau des pluies, qui ont provoqué des migrations massives.
On ne s’étonnera pas non plus de lire combien la responsabilité des pays riches pèse dans la dégradation de la situation alimentaire en Afrique: massivement subventionnés au Nord, les produits envahissent les marchés à un prix plus faible que la production locale, et les pays se tournent vers une agriculture d’exportation au détriment des cultures vivrières pour trouver de quoi vivre… Merci la PAC, dont la réforme a été repoussée à 2013 sous la pression, en particulier, d’une France gouvernée par les amis de Nicolas Sarkozy.
Il y a en proportion moins de mal-nourris en Afrique qu’il y a vingt ans. Mais la vie est la mort ne sont pas des facteurs proportionnels: 206 millions d’africains ne mangent pas à leur faim, quatre-vingt-six millions de plus…
Pour tenter de dessiner l’avenir, les experts du GEO ont brossé quatre scénarios. Le premier (Priorité aux marchés) ressemble trait pour trait à ce que nous constatons aujourd’hui, et qu’on a souvent baptisé business as usual. Le second (Action politique), marque un monde où des choix politiques corrigeraient le laisser-faire. Le troisième (Priorité à la sécurité) marque un monde plus fermé, ou le protectionnisme viendrait freiner les échanges internationaux, tandis que le dernier (Durabilité avant tout) dessine un «idéal» qui permettrait corriger la phénoménale soif de richesse et de consommation. Pour chaque paramètres, les experts ont ensuite dressé tableaux et courbes qui parlent d’eux-même, dans lequel chaque groupe de graphique compare les quatre scénarios. L’un d’eux a tout particulièrement retenu mon attention. Aujourd’hui, 18% de la planète vit avec moins d’un dollar par jour (35% en Afrique). En 2050, le scénario du «laisser-faire» ramènerait ces chiffres à 4% pour la planète et 14% pour l’Afrique. Mais le «durable» irait beaucoup plus loin: moins de 2% des humains auraient moins du fameux dollar quotidien, et 6% des africains. Qu’on ne vienne plus dire qu’il faut d’abord s’attaquer à la faim avant d’éliminer le carbone. Démonstration est faite que préserver l’environnement, c’est bien sauver l’humanité.
Image © Nasa