Remember, c’était il y a seulement un an. La plus puissante administration de la planète contestait l’idée même de la responsabilité humaine dans le réchauffement climatique. Des chercheurs se plaignaient que leurs rapports étaient enterrés sur ordre de Dobelyou. L’Agence de l’environnement lâchait la bride aux industriels. Et l’Amérique adressait un gigantesque bras d’honneur au reste de la planète.
Remember, c’était il y a seulement trois jours, le premier pas vers une «révolution verte» aux Etats-Unis. La chambre des représentants a voté le «Clean energy and security act». Mille trois cent pages qui devront encore être approuvée par le Sénat.
Il y a sans doute mille raisons de critiquer le texte, largement édulcoré pour éviter de se faire tailler en charpie par les élus américains. Car dès qu’on évoque le sujet, Obama n’est plus maître en son parti. D’ailleurs, la majorité a été courte: 219 voix contre 212, parce que 44 démocrates ont rejoint le camp du non (8 républicains ont eux voté Oui). Obama a lancé plusieurs appels solennels, il a réquisitionné Al Gore pour joindre les récalcitrants. Il a même fallu rapatrier les blessés pour gagner ce vote, raconte le Guardian, comme l’élu géorgien John Lewis, opéré quelques jours plus tôt. L’objectif de réduction d’émissions pour 2020 a été amoindri et plusieurs industries recevront gratuitement leurs permis d’émission de gaz carbonique, quand les initiateurs de la loi les avaient imaginé payants.
Pas facile de tenir un parti quand les intérêts des élus ne coïncident pas avec la volonté du Président. Les élus des états charbonniers, des régions dominées par l’industrie automobile et des régions rurales ont fait défection. Comme le rappelait Le Monde, un proche d’Obama, Arthur Davis, n’a pas hésité à s’opposer à son copain de fac. Davis est comme par hasard candidat au poste de gouverneur d’Alabama. Au Sénat, la guérilla républicaine appuyée par les «traîtres» à la cause d’Obama sera encore plus vive, et rien n’est encore gagné. Le texte devrait encore prendre des coups. Mais en attendant, Obama dispose d’un court répit et les Etats-Unis pourront enfin vivre un G8 sans passer pour les peines à jouir de la lutte contre le réchauffement.
Remember. En 1943, un patron d’IBM, Thomas J. Watson, aurait dit que «le marché mondial de l’ordinateur ne représente que cinq unités» (1). Et puis, ça a bricolé sévère dans les garages de Californie et on a vu le résultat. Il y a encore un an, le patron de la World Company expliquait qu’il n’y a pas de place pour la lutte contre le réchauffement. Mais ça bricole déjà dans les garages de Californie… Avec le feu «Vert» donné par la Chambre des représentants, et en attendant celui du Sénat, l’opportunisme des innovateurs américains risque de décupler.
(1) Aucun document officiel d’IBM n’atteste une telle déclaration. Lire l’enquête sur cette prétendue citation sur le site de Wikipédia.