Cette fois, il est en kiosque. La dernière mouture de Terra Eco propose un imposant dossier sur le climat et les climatosceptiques avec notamment un papier sur Allègre et un « kit argumentaire » sur l’état du climat. J’y signe une longue enquête —inédite je crois— sur les climatosceptiques, leurs réseaux, leurs influences, et la bataille qu’ils mènent sur internet. Je signe aussi, dans ce très riche numéro d’avril, un portrait de cet étonnant personnage qu’est Christophe de Margerie, le patron de Total, que j’ai rencontré la veille de Noël.
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Denis a écrit : « un kit argumentaire »
Je préfère quand les gens pensent par eux-même, plutôt que de répèter de manière pavlovienne ce qu’ils lisent dans ce genre de kit. Cette stratégie du « voilà La vérité », c’est exactement ce qui fait réagir ce qui sont qualifiés de « sceptiques ». Poursuivre dans cette stratégie, c’est donc souhaiter que une amplification de la vague « sceptique ».
Parce que les sceptiques ne diffusent pas de kits? Parce qu’ils ne pratiquent pas le copier/coller? Allons Olivier, un peu de sérieux…
Est-ce vraiment une bonne idée de faire la même chose que ceux dont on désaprouve le comportement ? Je ne pense pas.
De mon point de vue, la seule façon de faire en sorte que le débat climatique deviennent bien plus constructif qu’aujourd’hui, c’est de sortir des approches manichéennes « les gentils qui ont la vérité universelle » contre « les méchants sceptiques qui manipulent ».
J’ajoute qu’essayez de convaincre les gens qui sont déjà convaincus de la réalité du réchauffement c’est comme pisser dans un violon.
Avec le titre « Allègre et les climato-sceptiques : comment ils nous manipulent » (Terra-Eco), les « sceptiques » sont dès le départ traités de « manipulateurs » et donc agressés. Ce titre indique que le débat est fermé. C’est stérile.
Et d’une, le papier de mon confrère de Terra Eco n’est pas un copié/collé. Et de deux, vous savez bien que tout le monde ne peut pas accéder à, voire comprendre, la littérature scientifique. L’information du grand public passe donc par des médiateurs, qui sont pour l’essentiel des journalistes, ou des chercheurs quand ils se retrouvent dans des débats ou dans les médias. Dernière remarque, les auteurs des papiers ne sont quasiment jamais les auteurs des titres. Si vous n’êtes pas d’accord avec les choix éditoriaux de Terra Eco, adressez-vous à ses responsables, je ne peux pas parler à leur place. Je peux simplement vous dire que les « agressions » les plus brutales, c’est justement celles dont sont victimes les journalistes. Observez le vocabulaire employé par certains ici, mieux encore sur le site de Terra, ou sur ma critique du livre d’Allègre parue sur lexpress.fr. Allègre est tellement manipulateur que d’autres climatosceptiques prennent le soin d’expliquer —comme Rittaud vendredi— qu’ils ne partagent pas (toujours) ses vues.
Je suis bien d’accord avec vous Denis sur le fait qu’il y a des « sceptiques » violents », bornés et vraiment non constructifs.
Je considère aussi peu crédible une personne qui affirme à propos du réchauffement « je suis sûr que l’homme n’est pas responsable » qu’une personne qui affirme « je suis sûr que l’homme est responsable ».
Personnellement, j’ai l’intime conviction (je n’en suis donc pas certain) que les activités humaines ont leur part de responsabilité (quelle part ? C’est une autre question, l’hypothèse océanique me semble solide pour expliquer une part de ce réchauffement) dans le réchauffement observé entre les années 70 et 90.
Mais il est à mon sens fondamental de respecter les personnes qui ont une intime conviction différente. C’est cela mon message, je ne cherche pas à légitimiser la violence de certains sceptiques, je souhaite que le débat soit ouvert et constructif.
La fermeture éco-totalitaire (ou à l’inverse « sceptico »-totalitaire) du débat mène à l’impasse.
Vous trouvez que je suis éco-totalitaire?
Non, pas vous.
Je ne vous connais pas personnellement, mais je vous ai écouté sur Public Sénat et je suis votre blog régulièrement : je vous trouve très ouvert, peut être même un peu trop vis à vis de certains internautes (anti-GIEC ou pro-GIEC) : je pense que l’on peut s’attaquer aux idées, mais pas aux personnes.
Je regrette par contre (mais c’est votre liberté) que vous passiez du temps à écrire des trucs pour détruire le bouquin d’Allègre, alors que le débat climatique mérite mieux, à mon avis.
NB – Les sceptiques à l’honneur sur Yale Environment 360 :
http://www.electron-economy.org/article-liberer-les-politiques-energetiques-du-debat-climatique-par-ted-nordhaus-left-and-michael-shellenberger-yale-environment-360-47644584.html
(début de traduction rapide vers le français)
« Je préfère quand les gens pensent par eux-même, plutôt que de répèter de manière pavlovienne ce qu’ils lisent dans ce genre de kit. »
Sauf que tout le monde n’a pas la même formation intellectuelle.
Or une formation intellectuelle, c’est tout autant une formation de l’esprit que l’acquisition de connaissances : la formation qu’on a reçue a structuré, formaté notre esprit, nos façons de pensée, notre manière de raisonner. Autrement dit, face à une même question, tout le monde n’aura pas la même manière de penser et de raisonner : cela dépendra de la formation de l’esprit de chacun.
Si toutes les manières de penser et de raisonner sont bien adaptées à réagir à certaines problématiques ou interrogations, et mal adaptées à d’autres, les mieux adaptées ne sont jamais les mêmes face à une question particulière. Autrement dit, il n’y a pas de formation de l’esprit qui soit universelle : face à un certain type de questions, certains seront capables de raisonner de manière appropriée et efficace, et d’autres le feront de travers, selon leur formation de l’esprit. Et selon le type de questions posées, ce ne seront jamais les mêmes qui raisonneront de manière appropriée.
Le problème, c’est que, si nos modes de raisonnement façonnent et déforment notre perception du monde, on est rarement confronté à leurs limites et à leurs travers au point de s’en rendre compte. Donc on ne réalise pas qu’en fait, on a une formation de l’esprit qui forme (c’est-à-dire structure) notre raisonnement, au point, souvent, de le déformer, toujours de la même manière. (Et de ne pas s’en rendre compte n’a rien à voir avec un quelconque manque d’intelligence.)
Bref, « penser par soi-même », c’est une belle et généreuse idée, héritée des Lumières. Mais si aucune condition sur la formation de l’esprit n’est posée, dans de nombreux cas, c’est plutôt inefficace, voire carrément inapproprié (selon les cas). Tant que les conséquences en sont minimes, ce n’est pas trop grave : on peut assez facilement s’en accommoder. Lorsque les conséquences concernent un peuple entier (voire plus), ça peut être beaucoup plus fâcheux.
C’est quand même dingue qu’Olivier ait viré climatosceptique. Et c’est la même chose de Raymond Bonaterre du Blog energie. Mais où va le monde?
@DDQ : j’ai acheté (4,90€) et lu avec intérêt Terra eco.
Votre article est normalement dans la ligne éditoriale et du parti-pris de ce magazine sur le réchauffement climatique. Vous donnez cependant la parole a des climato-sceptiques pour exprimer les raisons qui les amènent à ne pas croire ou à douter, ce qui est bien, et ce qui est peut-être effectivement une première dans une revue de ce genre.
Comme vous l’avez rappelé ci-dessus, vous n’êtes pas responsable des choix éditoriaux de ce magazine. Mais lire dans l’édito (W Bouvais) que, en tant que climato-sceptique, je fais « le lit de ces nouveaux réactionnaires qui lutteront jusqu’au bout contre l’émergence d’une nouvelle société » me conforte dans le sentiment que « ce genre d’écolo » a une vision rigide du monde et un vocabulaire qui se rapproche des anciens communistes.
Vous et moi, nous voulons probablement un monde meilleur. Mais ce qui nous sépare, c’est que pour y arriver je crois, à la différence de vous, qu’il faut passer par le soutien au nucléaire civile pour diminuer notre consommation d’énergies fossiles, que les Enr ne pourront malheureusement jouer qu’un rôle secondaire dans une grande partie du monde pendant encore plusieurs décennies, et qu’il n’est pas nécessaire d’alarmer les populations avec des peurs du type « catastrophes hypothétiques prévues du RCA » et autres peurs millénaristes pour y arriver.
Beaucoup de naïveté et d’angélisme mélés à du charlatanisme de « vendeurs » peut conduire un pays voire une civilisation dans le mur.