Monsanto et ses amis ont du se jeter dessus. La parution d’un long rapport de l’Union of Concerned Scientists sur l’impact agricole des OGM laisse en effet penser que la Frankenfood n’a pas vraiment permis d’augmenter les rendements de culture de soja et de maïs transgénique aux Etats-Unis. Mieux, ou pire c’est selon, l’essentiel des progrès réalisés proviennent d’amélioration de techniques agricoles conventionnelles… Détail important, ce rapport s’appuie pour beaucoup sur l’analyse de statistiques officielles du Département américain de l’agriculture.
L’UCS s’est penchée sur deux types d’OGM: ceux qui sont ciblés pour la résistance à un herbicide, comme les «roundup ready» de Monsanto, et les autres, de type Bacillus thuringiensis (BT), qui sécrètent une toxine insecticide pour lutter contre certaines pestes comme la pyrale du maïs.
On commence par le maïs. En dépit de milliers d’essais depuis une vingtaine d’années, et des centaines de variétés OGM mises au point (résistances aux maladies, au stress hydrique, etc.), les rendements ne connaissent pas de gain important. Seule exception, les variétés BT, qui apporteraient un gain de 7% à 12% dans les champs, quand les attaques de ravageurs sont nombreuses, et un gain quasi nul quand ces derniers sont peu ou pas présents (ce qui est somme toute logique). A l’échelle des Etats-Unis, le rapport de l’UCS montre que la productivité des cultures de maïs a cru de 28% entre les périodes 1991-1995 (avant l’introduction des variétés OGM) et 2004-2008. Mais 24% de ces 28% proviennent de l’amélioration des techniques agraires conventionnelles…
Passons au soja, si précieux pour produire la viande avalée en trop grande quantités par les populations des pays riches. Aujourd’hui, treize ans à près le début du soja OGM, 90% des semences vendues aux Etats-Unis sont tolérantes à l’herbicide glyphosate. Les études ne manquent pas, qui montrent que leur apparition a simplifié et réduit le travail des agriculteurs et permis de réduire les dépenses de désherbants, relève l’UCS. Ce qui n’est pas si mal. Mais à regarder en terme de rendement, la réalité est beaucoup plus contrastée. Les sojas transgéniques n’apporteraient qu’une faible hausse de productivité, et parfois même une baisse: évaluée à 5% dans le cas d’une des études d’ampleur citées en référence par l’UCS. De plus, la généralisation de l’usage du glyphosate pourrait réduire son efficacité, en raison de résistances qui se développent dans la végétation, et qui ont déjà été observées aux Etats-Unis…
Forte de ses résultats, L’UCS pose évidemment la douloureuse question: la Frankenfood peut-elle répondre aux défis alimentaires de notre planète? Selon l’organisation, les recherches de transgènes pour augmenter les rendements n’ont pas permis de progrès, en dépit de centaines d’essais conduits en plein champ. Car on n’a pas encore tout compris de ce qui fait les beaux fruits: modifier un gène pour améliorer la résistance à la sécheresse (recherche phare dans un monde où l’eau est devenue un vrai problème) provoque parfois des effets indésirables sur la productivité, comme une baisse de l’immunité de la plante.
Bref, ce n’est pas demain la veille qu’on réduira la malbouffe dans les pays pauvres avec des semences transgéniques. D’ailleurs, même certains capitaines de l’industrie du gène le disent. Rappelez-vous les déclarations de Martin Taylor, le patron de Syngenta, l’été dernier. Mais pourtant, sur le terrain, on promet toujours monts-et-merveilles au public et aux agriculteurs. Le public n’y gagne rien, les agriculteurs pas grand chose. Mais les géants de la semence et du pesticides s’en tapent: ils encaissent de gros chèques!
(Au risque de passer pour un visiteur qui ne fait que signaler les erreurs… :
vous écrivez « 24% de ces 24% » ; ne serait-ce pas à la place de « 24% de ces 28% » ?)
Bien sûr. Merci!