La grande messe de Bali, qui ouvre ses portes ce lundi, pèsera lourd dans l’avenir de la planète. Rien ne sert d’espérer que les milliers de délégués et responsables d’ONG sortiront avec une copie bien propre, une feuille de route décrivant comment chacun agira au cours des trente prochaines années. Nous en sommes encore loin d’un protocole de Bali, destiné à succéder à Kyoto qui sera caduc en 2012.
Pour ceux qui auraient raté une étape, un petit point sur la situation. Le protocole de Kyoto, né le 11 décembre 1997 et signé par une très large majorité des pays (172 membres de l’ONU), Inde et Chine compris, fixe des engagements à certains pays, dits de l’Annexe 1, qui ont implicitement reconnu le rôle des pays industrialisés dans la situation climatique de l’époque. Les Etats-Unis l’ont signé, mais jamais ratifié. Ni Clinton, qui ne l’avais pas soumis au Congrès avant de quitter la Maison-Blanche, ni l’administration Bush, qui a toujours nié la réalité du réchauffement. L’Australie, qui devrait finalement ratifier le texte dans les prochaines semaines, avait suivi la ligne imposée par George Dobelyou avant que le conservateur Howard ne se fasse sortir par les électeurs la semaine dernière. Quand au Canada, qui a engagé sa signature en ratifiant le protocole, il traîne les pieds depuis.
Dans le protocole de Kyoto, les pays en développement sont exemptés d’engagements de réduction d’émission de gaz à effet de serre. Au contraire, ces pays sont éligibles aux mécanismes de compensation des rejets des pays du Nord: une entreprise du Nord soumise à un quota de gaz carbonique peut choisir d’investir dans un projet sans carbone dans un pays du Sud, plutôt que de réduire ses rejets. Un autre mécanisme, imposé par la Russie et le Canada, permet aux pays riches de prendre en compte les forêts, considérées comme un piège à carbone, dans son bilan de gaz carbonique.
Aujourd’hui, nous en sommes là. Avec une Europe, conduite par l’Allemagne, qui pousse à étendre le protocole pour s’attaquer de front au problème climatique. Car le protocole de Kyoto n’est qu’un pipi de chat à vocation politique: avec les Etats-Unis, il aurait freiné de 0,06°C le réchauffement de notre globe, qui pourrait atteindre cent fois plus d’ici 2100. Sans les Etats-Unis, on sera loin de cette valeur. Aujourd’hui, tous les experts s’accordent pour dire que les rejets occidentaux devront être divisés par quatre ou cinq, suivant les rejets de chacun, d’ici cinquante ans.
Jusqu’à présent, en dépit de la pression de nombreux Etats (notamment la Californie) et d’industriels qui se rendent compte qu’il serait pire d’attendre, Washington a toujours prétexté l’absence d’engagements chiffrés de la part des grands pays en développement (Chine, Inde, Indonésie, Brésil, etc.) pour refuser tout texte qui dépasse la simple déclaration de principe. Côté Sud, on explique qu’il n’est pas question de freiner le développement économique, nécessaire pour refaire le retard vis à vis des pays riches. Mais dans le même temps, la Chine est devenu le premier émetteur de gaz à effet de serre de la planète, l’Inde raffole comme Pékin du charbon, l’Indonésie et le Brésil défrichent à coup d’incendies leurs forêts humides, expédiant dans l’atmosphère des centaines de millions de tonnes de carbone piégées depuis des millénaires dans les sols.
L’ONU a jeté un pavé dans la mare tout récemment, en proposant que le Nord commence à réduire tout de suite ses rejets de carbone, avec un objectif de les ramener à 20% de ce qu’ils étaient en 1990, tandis que le Sud se verrait accorder un délai de grâce jusqu’en 2020 avant de ramener leurs propres émissions à 80% de ce qu’elles étaient en 1990. Une proposition équilibrée, même s’il faut peut-être revoir affiner les chiffres et le calendrier que devraient respecter les pays en développement, mais qui a été violemment critiquée dans plusieurs pays du Sud.
Voilà pourquoi, Bali devrait être l’objet de joutes sans précédent. Difficile de prédire ce qui en sortira de plus que le néant. Sans doute les principes de base d’un mécanisme d’aide -nécessaire— pour valoriser économiquement les forêts non détruites dans les pays du Sud. Sans doute aussi, une déclaration égoïste des nations nucléaires, qui réaffirmeront leur soutien à cette source d’énergie, tout en refusant de la distribuer à tout le monde: on ne badine pas avec les risques de prolifération. Bali, sommet de tous les égoïsmes?
C’était quoi déjà les mots de Ban Ki-Moon ? Ah oui « »J’ai toujours considéré le réchauffement climatique de la planète comme un sujet d’une urgence extrême. Maintenant, je crois qu’on est au bord d’une catastrophe si l’on n’agit pas ».
Pour donner une idée de l’efficacité de Kyoto, une des principales mesures est le système de permis négociables et le marché d’échange de permis mis en place en Europe pour le concrétiser.Quand à sa création en 2005 la tonne de CO2 était à 35€ environ elle est aujourd’hui à 0.05€, oui vous avez bien lu, 5 centimes la tonne !!!
Quelle entreprise va faire des efforts avec un tel prix aujourd’hui ? La main invisible du marché a encore frappé… à moins que ce soient les Etats distributeurs de quotas qui n’aient pas joués le jeu !!
Vous croyez qu’un jour sa changera ?
C’est vraiment découragent