Ce qu’il y a de bien avec la science, c’est qu’on passe vite des modèles à la pratique. Je lisais cette semaine le compte-rendu de travaux sur le comportement collectif face à un problème à résoudre, une sorte de « jeu du réchauffement climatique », qui montre combien il est difficile de motiver les individus à une cause commune. Et la démonstration est tombée ce matin, avec l’échec de l’Energy saving day, en Grande-Bretagne.
On commence par la preuve expérimentale. Hier, donc, les britanniques étaient invités à consommer moins d’électricité. Une opération qui avait reçu le soutien de grandes organisations éologistes, religieuses et caritatives et même de trois grands électriciens (EDF, E.On, Scottish Power). Il ne manquait que la BBC, qui s’était retirée du projet pour une raison obscure. Bref, il y avait quand même du monde pour expliquer à nos voisins combien ce premier “E-Day” prouverait qu’un petit effort de chacun conduit à un bienfait collectif. Las! Au lieu des 2% d’économie espérés, la consommation a cru de 0,1%: un temps un peu plus froid que prévu a eu raison de la (faible) participation à l’opération.
Revenons à la science. Du comportement s’entend. Ces travaux émanent de deux départements du Max Planck Institute allemand, qui se sont penchés sur la « tragédie des biens publics ». Quand un bien commun est gratuit, peu de gens en usent avec parcimonie. Autrement dit, puisque je sais que peu de gens font des efforts pour lutter contre la pollution (on peut aussi remplacer par « trier les déchets », « ne pas gaspiller l’eau », etc.), pourquoi me prendrais-je la tête?
Au Max Planck, donc les chercheurs ont imaginé un jeu qu’ils ont proposé à trente groupe de six étudiants. Chacun d’entre eux se voyait proposer d’investir dans la protection du climat, et recevait un « pactole » de quarante euros, avec la possibilité d’investir , 2 ou 4 euros à chaque session. Si 120 euros étaient rassemblés dans un groupe, chacun recevait du vrai argent. Sinon, le joueur perdait tout. Bref un vrai dilemme: si je n’investis pas assez, je perds. Si j’investis trop, il ne me restera pas grand chose. Verdict: la planète n’est pas prête d’être sauvée, en dépit de quelques uns qui ont investi plus que leur part, pour pallier l’insuffisance des autres.
Les chercheurs en sont tourneboulés. Car les groupes ne comptaient que six personnes. Quid d’une population de dizaines de millions, à l’échelle d’un pays? Ou d’une réunion rassemblant cinquante ou cent chefs d’Etat?
C’est bien pour ça qu’on n’arrivera à rien si certains ne se mouillent pas plus que d’autres. Comme on a aboli la peine de mort contre l’avis des sondages, il faudra bien que le politique ait le courage de prendre des mesures impopulaires et tenter de corriger notre insuffisance collective. Dans les années soixante-dix, on avait réduit d’autorité les livraisons de fuel domestique de 10%. Aujourd’hui, on laisse circuler des tanks 100% frimes sur les routes. Allez monsieur le lider maximo verde, un petit effort. Remplacez Lalonde par votre Carla préférée comme ambassadrice du climat. On ne sait jamais, elle pourrait peut-être en aguicher un ou deux pour la bonne cause.
Oui et il y a encore beaucoup de dadais qui pense que la démocratie est l’avenir ! … je vous laisse méditer sur l’avenir de notre monde d’impostures !
@ratmanoff
Ce n’est pas la question. Ce qui est en cause est plus le laisser-faire et l’individualisme. Au contraire, la démocratie permet de prendre une décision collective et de la transformer en loi. On pourrait donner l’exemple des pots catalytiques: si on avait compté pour leur développement sur la bonne volonté des automobilistes et/ou des constructeurs, ils ne se seraient jamais généralisés.
Pour l’anecdote, l’UNESCO avait commandé la création d’un jeu sur le développement durable à Bruno Faidutti (sponsor officiel des gens qui ont pas de télé et qui vivent très bien sans 😉 ) à l’occasion du forum de Barcelone… Le jeu obéit à des rêgles très similaires je dirais que la moitié du temps la terre est détruite (mais d’un autre coté l’autre moitié du temps la terre est sauvée)…
http://www.barcelona2004.org/eng/actualidad/especiales/jocterra.htm
Bon maintenant ce qu’il faudrait analyser c’est les raisons qui ont fait que l’E-day a été un fiasco alors qu’une autre initiative comme « the Bet » a été un franc succès…
(pour mémoire il s’agissait d’un pari avec la commissaire européenne Mme Wallstroem que les jeunes européens pouvaient réduire la production de gaz à effet de serre de 8% en 8 mois contre 8% en 8 ans pour les objectifs de Kyoto… pari qui fut gagné)
http://www.rac-f.org/article.php3?id_article=308
http://chicheweb.org/article.php3?id_article=28
J’ai ma petite idée là dessus ceci dit…