Comme d’habitude, certains ne perdent pas le nord. Il en va ainsi de la firme Planktos, dont j’ai appris l’existence en lisant le Washington Post aujourd’hui. Installée au pays de Schwarzy, la «jeune pousse» entend saupoudrer le Pacifique de poussières de fer, et revendre ainsi, sous forme de crédit d’émission, le surcroît de CO2 absorbé par l’océan.
Ca commence à faire un bail que cette histoire de limaille de fer empoisonne les esprits. Sur le principe, c’est séduisant: saupoudrez l’océan de nutriments, et le plancton sera dopé. Vivant, il pompe le gaz carbonique pour construire son squelette. A sa mort, il coule et piège le carbone au fond de l’océan.
Mais le problème, c’est qu’à supposer que la méthode soit acceptable, elle ne vaut pas tripette. Des travaux récents ont montré que si la fertilisation naturelle par les minéraux apportés par les courants est efficace, le saupoudrage ne produit pas le dixième de cet effet… Exit la fausse bonne idée.
Apparemment, les responsables de Planktos n’ont pas lu Nature, ou feint de l’ignorer… Eux qui ont déjà monté un business de plantation de forêt en Hongrie pour récupérer des droits d’émission de CO2 se débattent comme des beaux diables pour faire admettre leur idée de «forêt maritime» et tenter une première expérience de saupoudrage: 80 tonnes de fer qui seraient dispersées à l’ouest des Galapagos, nous raconte le Washington Post. C’est qu’il y a des pépites dans la ferraille: alors qu’elle ne fait que quelques dollars de chiffre d’affaires, l’entreprise pèserait 91 millions sur le marché. Mais on peut espérer que la bronca qui se dresse devant ces marchands de vent aura raison de ce projet débile. Le plus marrant, c’est que le Post non plus n’a pas lu Nature. Mais il est vrai que les travaux émanaient d’une équipe française, tandis que les chercheurs américains sont encore nombreux à croire qu’on peut calmer le radiateur planétaire en nourrissant le plancton à la petite cuiller.
Image: Nasa. Un «bloom» de plancton au large de la Bretagne.