Les OGM ont-ils vécu?

© Denis Delbecq
© Denis Delbecq

Les OGM, moyen de réduire l’usage des pesticides? C’est l’un des principaux arguments développés par l’Industrie depuis quinze ans. Et pourtant, une étude conduite pendant dix ans en Chine montre qu’aujourd’hui, les cultivateurs chinois de coton «BT» utilisent deux-tiers de pesticides de plus qu’avant l’adoption de ces semences transgéniques.

Le processus est on ne peut plus simple: comme le coton bacillus thuringiensis se débarrasse tout seul du principal ravageur, la noctuelle, les agriculteurs ont tout naturellement diminué l’épandage de pesticides. Et ces bienfaits s’étaient étendus à d’autres cultures autour des champs de coton. Après tout, c’est à ça que sert cet OGM. Mais faute d’insecticide, les punaises en ont profité pour proliférer, au fur-et-à-mesure de l’augmentation de la proportion de champs OGM, dans les régions étudiées. Prolifération à la fois dans les cultures de coton —elles détruisent jusqu’à 50% de la récolte— et dans les autres. Résultat, d’insectes banals, les punaises sont devenues des ravageurs, et les agriculteurs ont ressorti les sulfateuses.

Cela serait-il inéluctable? Les OGM ont-ils modifié la faune et la flore en moins de vingt ans au point de gommer leur bénéfice? C’est aussi ce que laisse penser la situation aux Etats-Unis, pionniers de l’adoption massive des OGM. Là-bas, ce sont les mauvaises herbes qui ont repris du poil de la bête, au point d’inquiéter les spécialistes, racontait le New York Times il y a dix jours. A force d’être aspergées de glyphosate (Roundup), un herbicide associé à des semences OGM de soja ou de maïs «Roundup ready», par exemple, les herbes folles ont développé une résistance. Elles sont devenues des surplantes, à l’image des superbactéries qui se sont adaptées pour résister aux antibiotiques.

En 2000, une espèce de surplante avait été observées dans un champ de soja dans le Delaware. Mais aujourd’hui le phénomènes concerne dix espèces, dans 22 Etats américains, sur plusieurs millions d’hectares. C’est encore peu proportionnellement aux surfaces cultivées, mais ça grimpe vite. Et cela concerne désormais les Etats-Unis, l’Argentine, l’Australie et l’Afrique du Sud. Face à cela, il n’y a pas trente-six solutions: soit l’arrachage ou la multiplication de l’épandage des herbicides. Selon le NYT, le géant Monsanto aurait commencé à subventionner des agriculteurs pour sauver les meubles. Retour à la case départ, un bond de vingt ans en arrière… Belle réussite!

4 commentaires


  1. Déplacer les équilibres est toujours dangereux quand on ne maîtrise pas tous les paramètres d’un système. Le résultat décrit ici était prévisible lorsqu’on considère des écosystèmes aussi complexes que la culture d’OGM où interviennent de nombreux paramètres (végétaux, sol, climat, faune, microorganismes…). Ce qui est choquant, c’est que quelques multinationales aient réussi à imposer leurs produits alors qu’une technologie basée sur l’utilisation d’OGM méritait certainement plusieurs décennies de recherche avant leur commercialisation. On arrive là aux limites du système capitaliste et libéral qui n’a rien prévu pour soutenir des études longues sans retour sur investissement à court terme. Quid des effets des nanotechnologies qui commencent à inonder le marché? Réponse dans 20 ans?



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