Les déchets électroniques, une vague qui déferle sur le Monde

© Denis Delbecq
© Denis Delbecq

A ce rythme, le Sud risque de finir noyé sous un tas de déchets électroniques avant que le climat ne lui tombe sur la tête! Un rapport de l’ONU présenté à la conférence de Bali qui réunit cette semaine les membres de la Convention de Bâle annonce des chiffres spectaculaires, du moins pour certains pays: En Chine et en Afrique du Sud, la quantité de déchets d’ordinateurs pourrait croître de 200% à 400% d’ici 2020. En Inde, la croissance de ces rebuts pourrait atteindre 500% (1). Pour les seuls téléphones portables, la croissance serait de 600% en Chine et 1700% en Inde sur la même période!

Les déchets électriques et électroniques (DEEE en français, E-Waste pour les intimes) sont une véritable plaie. Ils contiennent une multitude de substances chimiques, jusqu’à soixante variétés dans un même appareil relève le rapport: métaux lourds, retardateurs de flamme, PVC. Des substances toxiques et d’autres qui mériteraient d’être correctement revalorisées. Aujourd’hui, dans le monde, pas moins de 40 millions de tonnes d’E-Waste sont générés chaque année: ordinateurs, télévisions, téléphones, mais aussi appareils photos, frigos ou jouets bardés de composants. Les Etats-Unis sont une fois de plus les leaders avec 3 millions de tonnes par an, devant la Chine (2,3 Mt). L’empire accueille aussi des tonnages important de déchets électroniques venus du nord. Officiellement sous forme de matériels destiné à l’occasion, pour contourner la Convention de Bâle qui régit le transport international de déchets depuis vingt ans.

A parcourir le rapport publié par le Programme des Nations-Unies pour l’environnement (PNUE), on apprend une foule de choses intéressantes. Par exemple que nos ordinateurs et téléphones consomment 3% de la production mondiale d’or et d’argent, 13% du palladium et 15% du cobalt. Le PNUE s’est penché sur onze pays, jugés représentatifs de l’ensemble des pays du Sud: Chine, Inde, Afrique du Sud, Ouganda, Sénégal, Maroc, Kenya, Brézil, Colombie, Mexique et Pérou. L’étude révèle d’importantes disparités dans la production de déchets électroniques, écarts de niveau de vie oblige: l’ONU relève six fois moins d’ordinateurs mis au rebut en Inde qu’en Chine.

Les téléphones mobiles, ça vaut de l’or: dans une tonne de vieux appareils (sans batterie), on relève par exemple 3,5 kilos d’argent, 340 grammes d’or, 130 kilos de cuivre. Mais le problème, c’est qu’à l’échelle d’un appareil, ça se mesure souvent en milligrammes, alors la récupération ce n’est pas du tout cuit.

La cuisson. C’est souvent comme cela que les récupérateurs de Chine ou d’ailleurs travaillent. Il brûlent les cartes électroniques sans aucune protection (sympa les fumées chargées en métaux lourds et en dioxines) pour récupérer les métaux. Il existe bien évidemment des méthodes plus efficaces et moins risquées (elles sont décrites dans le rapport), mais elle ne sont pas ou peu utilisées en dehors des pays riches. Dans des pays comme l’Inde ou la Chine, l’embryon d’industrie officielle de recyclage des DEEE opère d’ailleurs dans des conditions jugées peu durables par les auteurs du rapport.

Il reste que ce pavé d’une centaine de pages nous laisse sur notre faim: car si l’existence d’un trafic international de déchets est avérée, aucun chiffre n’est donné dans le rapport, en particulier sur la Chine qui serait la première destination pour les déchets des pays occidentaux.

(1) Calculé par rapport à 2007. Le rapport n’est disponible qu’en anglais, mais il contient une version française de la synthèse.

10 commentaires

  1. Oui, YAB a bien montré ça dans un de ses reportages, les chinois sont la source et aussi la poubelle ultime, avec les indiens et certainement quelques pays africains. Ainsi va le monde de la gabegie , la crise ne va rien résoudre, puisque la politique est toujours en adoration du Gourou ‘Croissance’ !.
    C’est bien triste , et je fait parti des pollueurs, même si mon pc à 4 ans et mon gsm 5, ils vont surement y passer tôt ou tard victimes de la désuétude …

  2. D’un autre coté les chinois et les indiens sont en train de récupérer toute une flopée de matériaux rares et stratégiques. La finalité de la société de consommation c’est de nous transformer en pays du tiers monde…

  3. Le problème est que ce genre d’étude « ressorti » aujourd’hui fait parti de ces marronniers quasi journalistiques que l’ONU pond avec une précision toute helvétique (le rapport est au chiffre près celui de 2002 sur une enquête commençant avant 2000).

    Le constat était certes alarmant il y a qq années et les craintes justifiées. Sauf que maintenant ces trois zones : Inde, Chine et Brésil (50% de la pop mondiale) en sont arrivés à un niveau de croissance et de niveau de vie qui les amènent a considérer comme rentable l’industrie du recyclage. La plupart des grandes boites de recyclage ouvrent leurs usines dans ces pays ( et ce ne sont pas des ateliers d’esclaves découpant au chalumeau nos chères cartes électroniques). Bengalore, premier centre informatique Indien a des besoins en informatique qui dépassent ceux de la France. A titre d’exemple, Attero ou E Parisaraa, boites de recyclage Indiennes ne sont pas des officines de fond de jardin. En moins de cinq ans après un gros programme de l’Etat, le pays est déja capable de recycler totalement 5 % des 3.000 tonnes d’E waste annuels (plus des 2/3 sont déja traités mais pour les composantes les plus lourdes et certainement avec les risques humains cités par Denis D., le reste est récupéré par les producteurs ou revendu dans des pays tiers). Rien de fracassant, certes, mais laissons faire le meilleur moteur de l’homme pour régler un problème majeur….. l’intérêt. La France a mis de plus de 20 ans pour ses décharges à ciel ouvert….

    Sinon le pourcentage d’or utilisé dans la production IT sur l’extraction annuel est totalement erroné.
    A 12.000 tonnes / an d’extraction et 1 milliard de mobiles produits, avec qq centièmes de gramme d’or (0,034 g selon Encyclopedia of Earth), chacun verra de lui même l’absurdité des 3 % affichés.

      1. Je n’oublie rien Denis. La production d’ordi et assimilés est de moins de 300 millions d’unités par an (2/3 portables).
        L’or y est utilisé avec à peine plus de poids que les mobiles car il est en général associé au nickel (ou autre). Il n’y a pas les mêmes besoins d’optimisation d’espace que sur un portable, sachant que les cartes ne concernent qu’un faible pourcentage de poids et de taille d’un ordinateur.
        De plus (la ou l’article y est absurde) c’est que l’or est de faible qualité (5, 12 et rarement 18K). Il est aussi vrai que les derniers dual core et consorts utilisent moins d’or que les générations précédentes (mêmes les x386). On est donc toujours loin des 3 %… très loin

        Le recyclage actuel de l’or de l’électronique représente déja à ce jour près de 25% de la demande en or annuelle du secteur. Preuve que l’image (que dis je la « carte postale ») du tiers monde noyé dans ses déchets d’ordinateurs frauduleusement exportés par ces salauds de riches occidentaux est peu être émouvante mais comme fréquemment loin de la réalité.

        L’alarmisme ne sert aucune cause…mêmes les plus nobles. Il revêt même systématiquement une forme de paternalisme jésuite à l’oeil bienveillant sur les populations indigènes que l’on prétend protéger.

      2. Author

        Lisez les reportages qui ont été publiées (Libé en avait fait un sur la Chine, et un autre sur le Pakistan) qui décrivent comment bossent les récupérateurs… Mais vous aurez noté que le rapport de l’ONU sur penche sur la production locale de DEEE, pas sur leur trafic.

      3. oui je les ai vu. Et ma réaction était une synthèse à vos propos en sus des éléments du rapport. Et dans mon précédent post j’ai aussi reconnu vos dires sur les dangers humains de certaines activités dans ces pays (même si cela est bien moins grave et nocif que le recyclage des métaux industriels plombés, hydrocarburés, sulfurisés,….pratiqué à large échelle dans ces pays). La où je m’inscris en faux c’est dans la dynamique globale négative que le rapport et votre article veulent faire croire. Essentiellement parce que ce rapport prend une situation figée d’il y a 15 ans pour tirer des regles de 3 déja hors de la réalité.

    1. Beau discours théorique qui laisse de coté toutes les expériences de terrains… N’importe quel acheteur international pourra vous donner des exemples de « l’usine derrière l’usine » qui fait plus de production que l’usine super propre et super moderne qu’on vous fait visiter mais dans des conditions très différentes (euphémisme)… Faut arrêter de croire que les infrastructures sont capable de suivre une croissances à deux chiffres.

      Maintenant le chinois il est tout à fait capable de faire de la qualité (sinon il n’enverrait pas des gens dans l’espace) mais si vous lui demander de faire de la m.. pas cher et vite il vous fera de la m.. pas cher et vite et donc des officines de fonds de jardin…

      1. C’est juste un problème de gestion des déchets.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.